『 UNHOLY MASQUERADES 』louvinthe.

louve&hyacinthe / janvier 2021

masquerade, paper faces on parade. masquerade, hide your face so the world will never find you. masquerade, every face a different shade. masquerade, look around, there's another mask behind you ( @the phantom of the opera )

Votre mère vous fait savoir qu’il se tient ce soir une réception et qu’elle veut vous y voir, Monsieur Qu’est-ce que ça peut bien me foutre ? Elle vous notifie également que Mademoiselle Ziegfeld sera présente. Ah. La conversation se rejoue dans son esprit, limpide, funeste. Guindé dans un de ces costumes impossibles dont chaque pli est un gage de la sophistication et de l’élégance que l’on attend d’un jeune prodige de son rang, Hyacinthe rase les murs, son verre de champagne à la main. Lorsqu’il ne soutient pas les regards d’un air effronté, il les évite, fuit, esquive les salutations et aborde d’un air profondément ennuyé les rares qu’il ne parvient pas à feinter. Personne ne s’en étonne. Tout le monde le regarde d’un air amusé, les gens se permettent même des rires discrets lorsqu’il crache son mépris à demi-mots. Les proches de la famille ne s’étonnent plus des mouvements de révolte de cet enfant insolent, le regardent comme on observe un drôle de phénomène, un animal effarouché et vaguement agressif qui finira nécessairement par être maté, par être de nouveau ramené sous les sacro-saintes armoiries de la bourgeoisie. D’habitude, Hyacinthe est profondément agacé par ces tons paternalistes, par ces regards condescendants et ces rictus gentiment indulgents — mais ce soir-là, il les remarque à peine. Les iris sibyllins scrutent la salle, et on décèle presque une lueur inquiète qui perce la brume languide de ses yeux. La réalité est qu’il la fuit. Cette petite peste de Ziegfeld. Cette fille à papa vaine et inintéressante dans les bras de laquelle sa mère n’a de cesse d’essayer de le pousser. Parce que ça ferait tellement beau sur le papier, le petit dernier lié à l’Empire Ziegfeld ; et puis, rien n’est trop phénoménal pour racheter sa rédemption, hein ? Mais le problème, c’est qu’elle est terrifiante, la garce. Un monstre d’impétuosité et d’arrogance. Alors tout, tout plutôt que de passer une autre soirée avec elle. Hyacinthe, il se résout presque à feindre une migraine poignante et à s’enfuir par la porte de derrière — peut-être pourrait-il aller se cacher chez Oz, lui conter toutes les immondices que sa famille de dégénérés lui fait subir, se plaindre de sa vie qui n’est, après tout, qu’un vaste musée des horreurs. Mais il a à peine le temps d’halluciner l’âpre goût de la liberté qu’il tourne les talons et— là voilà. Impudente, orgueilleuse, victorieuse. À un mètre de lui, et toutes les issues se ferment soudainement. À son rictus d’enfant gâtée, Hyacinthe répond d’un regard noir, qui déroge momentanément à son air désabusé habituel. Tout serait si simple si elle ne prenait pas un tel plaisir à le supplicier dès qu’ils se trouvaient dans la même pièce. Ne pouvait-elle pas se concenter de l’ignorer ? De détourner le regard, de tomber d’accord sur leur mutuelle animosité ? Louve. C’est les dents serrées et le regard froid qu’il la salue. Les pupilles qui lancent des éclairs, la bouche qui se plisse en une moue ennuyée. Ta robe est parfaitement immonde, qu’il lâche, parfaitement résolu à être absolument irascible. On le prive de sa soirée pour une lubie nuptiale, pour une idylle imaginaire et inimaginable — hors de question qu’il fasse des courbettes et des mièvreries pour ravir la galerie. Cependant, c’est à demi-mots que son invective est prononcée ; Hyacinthe n’a toujours pas le courage d’afficher clairement le mépris qu’il a pour l’héritière Ziegfeld.

(c) mars+chrysalis
@louve ziegfeld 『 UNHOLY MASQUERADES 』louvinthe. 236745472

Depuis le berceau, Louve est de celles qu'on promet à de riches héritiers – étant une riche héritière elle-même. Tous les parents des alentours, voudraient qu'elle ait la bague au doigt, la rousse. La promesse d'un empire dont profiterait également son mari... Et ça l'amuse, en réalité, d'être l'objet de toutes les convoitises. Compte en banque sur pattes, future impératrice de l'entreprise familial, c'est un avenir brillant qui lui tend les bras. Alors, les uns et les autres cherchent à s'attirer ses faveurs, la brossant dans le sens du poil, la gamine au pelage fauve. Mais telle une bête sauvage, la môme n'est pas facile à dompter. Elle sourit, de temps en temps, sauf que ce n'est pas la preuve que c'est dans la poche. C'est une manière d'agir en société, qu'elle a bien retenue, la gamine à l'apparence parfaite, aux ongles soignés qui se transforment rapidement en griffes acérées. Elle sait se comporter, oui, distribuant des sourires, des 'bonsoir' polis, suivis du nom des personnes auxquelles elle s'adresse. Bien sûr que Louve paraît bien, ici, dans la haute société. La vérité, c'est qu'elle est aussi dépravée que ceux qui partagent son sang. Digne héritière des Ziegfeld, arrogante et viciée, qui ne craint ni le sang ni la dépravation de toutes les sortes. À cette réception en compagnie des Sterling, Louve sait qu'elle y trouvera sa proie favorite. Le jouet qu'elle s'est approprié, qu'elle pousse dans ses retranchements à chaque rencontre. Elle y prend un malin plaisir, comme un chat jouant avec une souris, jusqu'à temps d'en faire son repas. Louve, elle a ce même côté animal... Le prénom qui lui sied si bien finalement. Du regard, elle le cherche, puis le repère, et le traque. À sa poursuite sur ses talons hauts, elle s'excuse d'un sourire hypocrite quand elle se fraye un chemin à travers la foule d'aristocrates. On lui fait remarquer, de temps en temps, qu'elle est très belle, ce soir. On lui dit même qu'elle a la beauté de sa mère, et la prestance de son père. Elle le trouve, finalement, se plantant derrière lui sans un bruit, comme un félin qui se cache. Il la salue, loin d'être aimable, et c'est un sourire narquois qu'elle arbore, dont elle ne se départit pas à l'instant où il se montre méchant. « Au moins autant que ta tête de cul, Sterling. », répond-elle, du tac-au-tac. Aucune oreille indiscrète n'est tendue en leur direction, alors, elle peut se montrer aussi abominable qu'elle en éprouve l'envie, la rouquine. Face à la mine dégoûtée de Hyacinthe, qui se serait sûrement passé de leurs habituelles joutes verbales... De la manière qu'elle a de le regarder comme si elle comptait n'en faire qu'une bouchée. Chat qui joue avec sa souris, plante ses griffes, et les remue dans les entrailles du jeune Sterling. Dangereusement, elle s'approche de lui, pose une main sur son torse, tout près de son cœur. C'est qu'elle pourrait presque le sentir pulser sous sa paume, de peur. Elle sourit, quand elle approche ensuite son visage de celui de Hyacinthe, son corps plus si loin du sien, provocatrice même si elle sait que seuls les hommes l'intéressent. Elle le saurait, autrement, à se comporter ainsi avec lui. À l'allumer juste pour le rendre mal à l'aise. « Tu devrais t'entraîner à embrasser la mariée... Pour que ça fasse vrai, tu sais. », siffle-t-elle, à la manière d'une vipère. Elle ne sait pas vraiment s'il a de l'expérience, Hyacinthe, au point qu'elle doute de toutes ses capacités. « Pareil pour concevoir un héritier, Sterling... Tu ne voudrais quand même pas décevoir tes parents ? Que votre lignée s'éteigne là ? », ajoute-t-elle, poussant plus loin encore. Parce qu'un mariage, c'est bien beau, mais leurs parents respectifs, ils ont ce côté Ancien Régime, aussi... Où l'alliance signifie aussi futur héritier.

@hyacinthe sterling

louve&hyacinthe / janvier 2021

masquerade, paper faces on parade. masquerade, hide your face so the world will never find you. masquerade, every face a different shade. masquerade, look around, there's another mask behind you ( @the phantom of the opera )

Il est pas particulièrement valeureux, Hyacinthe.
Mais lorsqu’on parle des femmes, il a un certain talent pour se dérober expressément à leurs étreintes lubriques. Celui qui accepte sans broncher les pires hérésies de la part d’hommes qui ne mériteraient peut-être même pas de toucher son corps sanctifié tremble de sentir une main féminine effleurer son épaule. C’est Lucrecia qui, le plus souvent, doit éconduire les tentatives aimables de ses amies, charmées par ses airs de poupée, par la subversion qu’implique l’androgynie d’un amant tel que Hyacinthe.
Mais Louve, elle, est douée pour la chasse.
Et sa chère jumelle n’est pas là pour détourner l’attention de la rouquine.
Alors il encaisse, et ses lèvres se plissent en un rictus agacé. Tandis qu’elle répond à son invective par un mot non moins agréable, ce sont ses yeux qui fusent autour d’eux, désespérés de trouver la moindre issue. Oh, il la hait. Elle et et ses grands airs, elle et son sadisme qui n’a d’égal que celui de son père ; un véritable taré, lui aussi. Un tel démon que Hyacinthe en aurait presque envie d’aller se cacher dans les jupes de son père, cet atrophié émotionnel qu’il se plaît pourtant à dépeindre de mille nuances d’amertume. Et voilà qu’on veut le pousser dans les bras de la progéniture de ce névropathe, voilà qu’on l’enchaîne à cette succube vicieuse et féroce ? Hyacinthe sent la bête s’approcher ; littéralement. Son parfum entêtant l’enveloppe et l’assomme presque, lui porte le coeur au bord des lèvres. C’est avec une grimace incommodée qu’il la regarder s’approcher, toujours plus près, toujours plus menaçante ; à cette distance, il peut discerner toutes les imperfections inexistantes de son maquillage, reconnaître la nuance de rouge qu’elle porte à ses lèvres. Presque la même que celle qui colore ses joues enflamme ses clavicules. Hyacinthe maudit son corps de réagir comme cela, de réagir si naturellement.
Parce qu’il n’aime pas ça.
Dieu seul sait qu’il n’aime pas ça;
Et lorsqu’elle pose sa main sur son torse vibrant, martelé par les heurts de sa myocarde affolée, c’est comme le geste de trop. Les doigts de l’enfant terrible enserrent fermement le poignet d’une promise qu’il aurait préféré jeter aux Enfers. La terreur qui fait briller ses yeux vacille, en vient aux mains avec un élan d’animosité enragée. — Plutôt crever, Louve. Sans rancune, hein, mais plutôt crever. Il lui crache ses mots à la gueule, avec toute la véhémence que des phonèmes peuvent porter. Et lorsqu’elle lui parle d’héritier, il ne cherche même plus à dissimuler la grimace qui tord ses traits. T’es débectante. C’est cependant un ricanement qui accompagne sa réponse ; parce qu’il ne peut pas s’empêcher de trouver l’ironie délicieuse. Il s’doute bien que ses parents ne s’attendent plus à grand chose de lui, alors, un descendant ? À vrai dire, il imagine même pas son père se réjouir d’apprendre que les gènes de ce fils vicié ont trouvé à se reproduire. Va t’faire ligaturer les trompes, ma belle. La perspective de t’engrosser ne fait que me répugner encore plus de l’idée de te toucher — en admettant que ce soit possible. Qu’il marmonne, en se baissant pour passer sous le bras de Louve. C’est avec un regard noir et doigt d’honneur qu’il s’éloigne, bien trop soulagé que plus rien ne se dresse entre lui et la sortie.
Mais l’apaisement est de trop courte durée. Elle le suit. Il sent son regard d’harpie brûler sur sa nuque. Il sent son rictus machiavélique prédater ses ambitions de tranquilité. Dents serrées, poings crispés, ce n’est que lorsqu’il a passé la porte de la salle de bal et qu’ils se retrouvent seuls dans un couloir qu’il se permet d’exploser.
— Veux-tu bien me laisser tranquille, à la fin ?! Y’a bien assez d’queues sur lesquelles t’asseoir, merde. La voix chevrote un peu, fait trembler son accent d’aristocrate névrosé. Parce qu’il vient seulement de se rendre compte qu’il est en face à face avec elle, sans aucun témoin pour réfréner la cruauté de l’héritière.
Et il ne fait pas le poids.

(c) mars+chrysalis
@louve ziegfeld 『 UNHOLY MASQUERADES 』louvinthe. 236745472