INTRIGUE: et aaaaction!

Les pieds posés sur le dossier du fauteuil devant moi, les yeux clos, on pourrait croire que je pique un somme. J’écoute… À peine dérangé par les bruits de mastications et de téléphone, je reste concentré sur les sons du film. Les bruits, non pas les dialogues ni même l’intrigue. Juste les sons, leur construction, la manière dont il s’imbriquent les uns aux autres…

Mon nom aurait pu figurer sur le générique de ce navet, si ma crise maniaque n’était pas tombé à ce moment-là : j’aurai eu le contrat… Les choses auraient été au moins “écoutables” si j’avais été sur la production, j’en suis persuadé. Parce que si je suis instable, je n’en suis pas moins doué, je ne peux pas être une catastrophe dans tous les domaines confondus. Si j’ai pris ce ticket de cinéma par amertume, je ne ressens désormais que ce vide immense qui se creuse dans ma poitrine. C’est pas le moment de replonger en dépression. Ça pourrait sonner comme une mauvaise vanne, du film tellement pourri qu’il vous donnerait envie de vous tirer une balle dans la bouche, mais  c’est beaucoup moins drôle quand ces pensées viennent réellement buller dans ma tête.

Comme pour mettre fin à mes idées noires, le son s’arrête. Des gloussements, des chuchotements. Serait-ce terminé ? J’ouvre les yeux sur les ténèbres.

- Fais chier…

Panne au cinéma, un signe du destin. Une voix s’élève, demande s’il y a un bug, aucune réponse ne vient. Les secondes s’égrènent et la tension augmente dans la salle. Paradoxalement, la situation donne un coup de fouet à mon humeur.

J’attrape mon cellulaire pour actionner la lampe torche, je me lève et envoie le jet de lumière en pleine face de la personne deux sièges devant moi, on peut mieux faire comme approche, faut pas trop m’en demander…

- Hé, tu viens voir c’qui s’passe ?

J’me serait passé de compagnie, mais puisqu'elle est sur mon chemin…

Son pied bat la mesure pendant que les minutes s'étirent bien trop lentement. Elle est en colère contre elle-même, se demande ce qu'il lui a pris de venir se faire chier pendant deux heures au cinéma. Sérieusement...
Au vu du navet qui se développe sous ses yeux, Dolores considère ce temps comme perdu et ça l'enrage. Elle aurait pu se rendre au spa et se faire masser ou même se faire un soin des pieds. Ou plein de choses mais en tout cas, pas dans ce cinéma. Forcément, elle passe le temps en regardant son téléphone, en envoyant des sms pour se plaindre à Gali, à ses amies aussi. Lisant également les critiques de ce film. Elle a même créé un compte pour y apposer la sienne et dire tout le mal qu'elle en pense. Bref, Dolores espère vivement que tout se termine.
Heureusement, ça l'est. Du moins, pas comme elle l'espère: le claquement sonore est aussi bref qu'inattendu, plongeant la salle dans le noir. Si au départ, elle croit qu'il s'agit du film, les murmures de protestation lui font vite comprendre qu'il y a un souci, au même moment où son téléphone s'éteint parce qu'elle ne plus de batterie.
- Et merde, qu'elle bougonne en rangeant ce dernier dans son sac à main, se trouvant à ses pieds.
- Quelqu'un peut allumer la lumière, là ? Demande Dolores en fronçant les sourcils. Les murmures se font plus fort et effectivement, il y a vraiment un souci. C'est là qu'elle réalise qu'une salle de cinéma sans lumière ou écran, c'est légèrement angoissant bien qu'elle ne se considère pas comme une chochotte.
Ses yeux se plissent lorsqu'elle se prend la lumière d'une lampe torche dans la tête. Son bras se lève pour se faire un pare lumière digne de ce nom, pendant qu'elle rétorque déjà: Déjà, tu dis s'il te plait. Et dégage ta lampe, j'y vois rien.
Elle se lève déjà. Prend son sac Dior entre ses mains, perchée sur ses talons hauts tout en essayant d'évaluer la situation. Il y a forcément une sortie de secours ou autre. Aussi, elle tend un doigt impérieux vers une silhouette qu'elle voit grâce aux téléphones activant la lampe torche. Toi, vas voir si on peut sortir par l'issue de secours. Et toi, tu devrais aller en haut. Il est hors de question que je descende ses escaliers dans le noir, je vais me tordre la cheville.
De ce fait, elle s'auto élit comme celle qui donne les ordres pour que les autres s'exécutent. Au moins, on ne connaîtra jamais la fin de ce navet.

Citation :

- Coyote, mon chou, j'ai répondu à la place de Delilah, elle est en absence et elle n'a pas répondu à mon MP. Du coup, je pars du principe que Coyote éblouit Dolores
- pour les portes et pour maintenir l'intrigue, on va dire qu'elles sont fermées le temps de l'intrigue. Pourquoi ? Je ne sais pas.