blood in the water (love)

T’es obstinée. Y a rien qui t’empêche d’arriver à tes fins, toi, non? T’es impatiente, en plus, alors tu n’arrêtes jamais. T’es complètement dévouée dans tout ce que tu fais. Peut-être trop, parfois, parce que tu t’y perds, mais t'es courageuse et chaleureuse. T’es attentionnée, tu chéris les détails comme ceux à qui tu tiens. T’es calculée aussi, tu réfléchis trois coups d’avance, ou en tout cas t’essaies, parce que t’es trop impulsive. T’es tellement sensible, mais ils ne le savent pas, parce que t’es réservée. Ça non plus, ils ne le savent pas, parce que tu as appris à bien jouer, à le cacher. T’es autoritaire depuis que t’es haute comme trois pommes mais tu ne l’assumes que depuis que t’as passé l’adolescence. T’as été bien jalouse, pendant cette période-là, faut te l’avouer, mais t’as appris à laisser aller. Aujourd’hui, t’as la tête qui va à cent à l’heure, mais tu es plus simple à suivre. Enfin, c'est ce que tu penses. Probablement pas, au fond.



and if only i could hold you
you'd keep my head from going under

Tu clignes des yeux à quelques reprises comme si tu essayais de te réveiller. Tu n’arrives pas à croire ce qui se passe et tu continues de te dire que ce n’est pas possible, que ça ne doit être qu’un cauchemar. D’un coup, tu te sens comme engourdie, tu as l’impression que tout se passe au ralenti lorsque tu recules de quelques pas pour t’asseoir sur le canapé qui se trouve derrière toi. Tu te rends compte qu’elle rajoute quelque chose en se rapprochant, mais tu ne comprends rien de ce qu’elle te dit à ce moment-là. La seule chose que tu entends, c'est la petite voix au fond de ta tête qui te dit que t'aurais dû être là, ces dernières années. Au lieu d'aller vivre ailleurs, d'aller en Angleterre, tu aurais dû rester en Écosse et t'occuper d'elle, profiter des moments passés avec elle. Le dernier souper de Noël, le dernier party de famille au jour de l'an, le dernier ménage du printemps de son fichu cabanon, le dernier été au chalet...

Tu passes les mains sur ton visage puis dans tes cheveux, les coudes sur les cuisses. Ce n'est qu’au moment où tu vois une tâche plus foncée sur ton jean que tu réalises que t’as les yeux mouillés de larmes et que l’une d’elle vient de t’échapper. Même si tu as toujours été quelqu’un de très impulsive et sensible, c’est bien la première fois que tu te montres aussi vulnérable devant elle, et tu détestes ça. Tu ne lèves pas les yeux lorsqu’elle se poste devant toi et tu ne réagis pas non plus lorsqu’elle passe une main douce et rassurante dans tes cheveux. Tu te mords la lèvre et prend une grande inspiration. Tu voudrais calmer les petits soubresauts qui tentent de s’emparer de tes épaules. « Ça va aller. » Tu secoues légèrement la tête. Non, tu ne penses pas. Tu ne la crois pas. Tu sais trop bien ce qui va arriver, tu l'as vécu avec ton oncle déjà, et tu es anéantie. Elle abandonne, elle t’abandonne. Elle ne veut pas passer le reste de ses jours à souffrir, à être malade, alors elle a décidé d’arrêter la chimiothérapie. « C’est promis, Jamie, tout ira bien. » Tu pinces les lèvres et te redresses pour la serrer contre toi. Tu sens ses bras minces et fragiles entourer tes épaules avec soulagement. « Je t’aime, maman. » Ton visage enfouit dans son cou, tu laisses les larmes couler sur tes joues. « Moi aussi, my love, plus que tout. » Elle va rester avec toi et ton beau-père le plus longtemps possible, elle va passer le reste de ses jours en étant complètement avec vous. Pourtant, malgré les beaux moments que tu as pu passer avec elle après ça, tu crois que t’as dit au revoir à ta mère, ce jour-là.


i don't know what i'm supposed to do
haunted by the ghost of you

T’inspires, t’expires. T’inspires, puis t’expires. Ta respiration, c’est la seule chose à laquelle tu penses. Tu te concentres dessus, tu t’y accroches comme à une bouée de sauvetage. Tu essaies de faire le vide dans ta tête. Tu sens que tes jambes sont fatiguées, tu les sens qui brûlent, et tu apprécies cette sensation qui te fait sentir vivante. Tu es vivante, tu es là. Tu es là.

Puis soudain, tu ne l’est plus. Pendant un bref instant, du moins, tu es de retour en enfer, de retour là-bas, à l'hôpital, au cimetière. Tu ralentis, ta course se transforme en marche, puis tu t’arrêtes. Une seconde, deux secondes. Tu fais un pas vers l’arrière et tu jettes un coup d’œil aux alentours, comme pour t’assurer que tu es entouré d’arbres plutôt que de pôles à solutés.

Tu t’es demandé si elle avait été une sorte de mirage, une illusion tordue sortie de ton imagination, quand tu l’as vu dans ce chemin de terre battue, et elle ne l’est pas. Elle ne l’est pas, elle est juste là, devant toi. « Maman. » La tonalité de ta voix est plus faible que tu ne l’aurais voulu, peut-être parce que tu t’étais plus parlé à toi-même que tu lui parlais à elle, mais elle est tout-de-même claire dans le silence de la nuit, uniquement dérangé par le vent qui souffle dans les branches. Tu essaies de calmer ta respiration, toujours rapide et saccadée, et tu te rends compte que tes poumons aussi sont en feu, pas que tes jambes. Tu ne sais pas pourquoi, tu ne penses plus à rien quand tu avances finalement de quelques pas vers elle. « Maman? » Cette fois, c’est bel et bien à elle que tu t’adresses.

Tu la regardes, la détaille, même si au fond tu la connais par cœur, parce qu’elle a été à jamais gravée dans ta mémoire. Tu ne sais pas quoi lui dire. Tu as envie de lui dire que t’es désolés. Désolée pour ce qui s’est passé, désolé de ce qui vous est arrivé, lui est arrivé surtout.

Elle se retourne enfin vers toi et tu réalises l'erreur que tu viens de faire. « Oh mon dieu, j'suis vraiment désolée. » Tu lèves des mains tremblantes en l'air. Tu n’arrives pas à croire ce qui vient de se passer. La dame est là à te regarder, la bouche grande ouverte. Elle doit te prendre pour une folle. À sa décharge, tu commences à croire que tu l’es peut-être un peu. « Pardonnez-moi, pardon... » Tu recules. Elle tente de te dire quelque chose, peut-être qu'il y a pas de soucis et de te demander si tu vas bien. Tu secoues la tête. « Oui oui, vous inquiétez pas, vraiment. » Et puis tu repars dans la direction opposée en courant. En courant le plus vite que tu le peux.


quiet when i'm coming home and i'm on my own
i could lie, say i like it like that, like it like that

Tu joues avec le stylo entre tes doigts, les yeux un peu perdus dans le vide, pendant que t'essaies de trouver une solution au problème que te pose l'enquête sur laquelle tu travailles. Tu essaies de trouver ce qui t'a échappé. Comme à ton habitude, tu revois les scènes, les tableaux, les rapports dans ta tête. Tu les analyses. T’as une mémoire photographique, qu’ils disent. Tu essaies de les voir sous une nouvelle perspective. Tout ce que tu réussis à faire, pourtant, c'est de tourner en rond. Tu poses finalement le stylo sur une pile de papier et soupires.

« Encore en train de penser à cette putain de mafia? » C'est probablement la seule chose qui te garde encore saine d'esprit. Tu hausses les épaules en faisant demi tour sur ta chaise de bureau, l'air vaincu. « Tu sais bien. » Il n’a pas besoin de te poser la question. Tu ne fais que commencer dans cette unité, mais t’es déjà submergée par le travail. « Qu'est-ce que tu dirais d'une ou deux bières au bar après le boulot? » « J’dirais pas non. » Tu te retournes de nouveau pour faire face aux piles de papiers trônant sur ton bureau. Ton collègue te relance, dans ton dos: « Hey, t'as vu le gratte papier du fédéral? » Tu fais signe de non de la tête parce que tu sais qu'il te regarde. « De quoi tu parles? » tu réponds un peu distraitement en tournant quelques pages d'un dossier épais. « Il est ton genre. » « Si tu le dis. » « Je te le dis. »

Après environ une minute pendant laquelle tu t'efforces de ne pas lui porter attention, tu finis par soupirer. C'est plus fort que toi, il a piqué ta curiosité. Tu te retournes à nouveau sur ta chaise. Il lâche un rire gras, fier de lui. Tu hausses les sourcils, un peu impatiente. « Il est dans la salle d'attente. Il veut parler au chef, je crois. À ce qu’il parait, il est là pour l’enquête sur la mafia que t’as là. » Il pointe un des nombreux dossiers posés sur ton bureau. Il ballait ensuite l’information d’un coup de main en l’air, mais toi, tu t’y accroches. « Peut-être que tu peux aller le reconduire à son bureau, l'attendre avec lui, question d'être polie, non? » Avec un sourire en coin, il rajoute: « Allez, faut que tu te laisses aller, parfois. » Il a raison, tu le sais, mais toi, t’es obsédée par cette enquête et t’as plus qu’une idée en tête, maintenant.

ton pseudo sur la toile. a écrit:

A tes méchantes blessures. j'suis déjà de retour, mes chats. j'vous aime trop, du coup d'me dédouble . (bisous de la part de landon ).
kezako, ton perso. un inventé.