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CLOSER TO THE EDGE. (lucyax)


all monsters are human. :: 'til her daddy takes the t-bird away. :: archive des rp.
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MessageSujet: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyDim 14 Mar - 0:31

max&lucrecia / mars 2021
i don't remember the moment i tried to forget, i lost myself, is it better not said ? now i'm closer to the edge. it was a thousand to one and a million to two, time to go down in flames, and i'm taking you, closer to the edge. (@thirty seconds to mars)

Elle avale un bol de lait dans lequel la pâleur de son menton semble s’effacer. Ses gestes sont d’une lenteur inconsidérée. C’est comme si ses doigts maigres peinaient à enserrer la tasse, délicate porcelaine anglaise, subtilement décorée. Des roses de toutes les couleurs viennent habiller la blancheur de la céramique, englobent toute la courbe, remontent jusqu’aux lèvres à peine entrouvertes, la grâce du corps qui se meut, silencieusement. Lucrecia a de ces airs de muse immatérielle, ces grâces raffinées qu’on n’aperçoit que dans des tableaux sublimes de la Renaissance, couvertes de lierre ou de lilas. Seule, pour une fois, elle a les jambes précieusement croisées sous la table immense de la salle à manger. Elle petit-déjeune avec des milliers d’empereurs, croise le regard d’un buste de Néron, promène ses yeux le long du manteau d’hermine d’un Napoléon, admire le sceptre d’un Henri VIII victorieux. Parmi les illustres, elle s’efface, la petite colombe, la chevelure d’or et son air de dauphine prête à régner. Elle appartient tout à fait à ce milieu perlé de gloire, cristallin et distingué, où chaque petit doigt levé l’est fait avec une grâce indigne du moindre sang-mêlé. 



Elle soupire lourdement en repoussant lentement sa tasse. Comme un chaton, elle n’a que peu d’appétit, se contente de laper quelques goûtes de lait puis boude sa maigre gamelle, rassasiée. Elle lance un regard à la montre Cartier qui orne son poignet, dernier cadeau d’anniversaire d’un père ornant sa petite beauté. La trotteuse résonne en rythme avec l’immense horloge de l’entrée, affichant les longues heures de la matinée auxquelles elle se condamne elle-même, sans jamais trop savoir pourquoi. Elle dort peu, passe la plupart de son temps à lire, se meut lentement, sauf lorsqu’elle danse. Sa vie semble rimer avec l’indolence immense de l’aristocratie de fin de siècle, se laissant mourir tout en pratiquant son essence même, destinée à mourir avant que la vie n’ait ne serait-ce que commencer. Mais la rose s’ennuie sous ses splendides pétales, elle s’étouffe sous sa robe pourpre, s’étrangle de tweed et de s’assassine de tulle. Lentement, elle s’anime, enfile une paire de babies qui allongent un peu ses jambes minuscules, coince le programme du mois de l’opéra juste sous son bras. Lucya vit dans son monde de plumes où rien aucun mal ne semble plus subsister. Même au fin fond de l’effroyable Exeter, elle semble vivre dans une bulle d’opale, à l’abri du moindre mal. 


Lorsqu’elle rejoint la cour de la maison, elle s’installe doucement sur les marches, feuillette un peu le papier glacé, soupire de nouveau. Les yeux délicatement baissés sur ce qu’elle lit, ses cils interminables habillant ses paupières raffinées, c’est tout un mirage de tendresse et de beauté. Impossible de ne pas s’attacher à cette Lucya, formée et forgée pour être aimée. Lorsqu’une voiture finit lentement par s’arrêter à sa hauteur, cependant, son visage se transforme. Ce sont des yeux agacés qu’elle relève vers le conducteur. Un regard fermé qui étonnement ne lui va pas. C’est le masque qui tombe, les paupières toujours mi-closes mais seulement pour encadrer des yeux froidement bleus foncés. « Vous êtes en retard. » Lance-t-elle froidement en ouvrant la portière, sans lui laisser le loisir de le faire. « Ne me regardez pas comme ça. Les autres chauffeurs étaient occupés et j’ai vraiment besoin de nouveaux chaussons. Je n’ai pas eu le choix. » Elle s’installe sur le siège passager, soupire, boucle sa ceinture sans attendre sa réponse. Elle n’avait pas revu le vieux grognon depuis l’altercation de la dernière fois, pas recroiser son regard glacé depuis un petit moment déjà. Elle croise les bras sur son torse, inspirant lorsque la grille se rouvre de nouveau. De là, le jour se transforme soudainement en nuit, des cris s’élèvent soudainement et elle réalise. Aujourd’hui signe les premières manifestations du printemps, le peuple survolté réclamant ses droits. Elle grimace un peu, inspire, se redresse sur son siège. « Et merde. » Jure-t-elle en se massant le front. L’atmosphère électrique de l’habitacle suffisait bien assez pour tendre leurs deux corps si opposés.
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@Max Gunn CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) 2453064100
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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyDim 14 Mar - 13:10












closer to the edge


Le message était arrivé aux aurores, à une heure certainement trop matinale. Surtout lorsqu'on savait qu'il avait passé une partie de la nuit à s'occuper d'une livraison pour Ziegfield, et qu'il n'avait eu le loisir de rejoindre son appartement qu'au milieu de celle-ci. Forcément que ça ne l'a pas enchanté, l'idée de devoir rejoindre si tôt la demeure des Sterling ; surtout qu'il savait quel type de compagnie l'attendrait. Les paupières collées au ciment, frottant comme du papier de verre, Max se redresse sur le matelas, la tête lourde. Ses longs doigts plongent dans sa tignasse, appuient sur son crâne. Avant, une nuit avortée n'aurait pas constitué un problème en soi ; mais depuis quelques années maintenant, c'était comme si son corps lui même lui rappelait expressément l'importance absurde de son propre éreintement, qu'importe à quel point il essayait de l'oublier. Il détestait ça. Les courbatures matinales, les muscles qui coincent, l'asthénie morose qui l'envahissait lorsqu'il avait l'insolence de négliger qu'il n'était plus qu'un quadragénaire fourbu.
Presque par automatisme, ses doigts tâtonnent sur la table de chevet, jusqu'au paquet de cigarettes gisant là. Le briquet s'allume, la fumée s'évapore. Autour de lui, le désordre est total, sorte de reflet cynique à sa propre solitude au sein de ces lieux moroses et silencieux. Le corps se déplie enfin pour se lever, il enfile machinalement le jean usé qui traine plus loin, exhale avec résignation. En réalité, au delà de l'agacement, il avait surtout été étonné de voir la cadette des Sterling le contacter de nouveau. Après leur altercation précédente, il avait imaginé qu'elle serait trop froissée pour s'adresser à lui, et pour être honnête, l'idée l'aurait arrangé. S'il y avait bien une chose qui déroutait Max et l'irritait, c'était d'avoir affaire à des êtres qu'il n'était pas tout à fait en mesure de cerner, qui se complaisaient dans la confection de masques pour abuser leur monde ; il avait toujours valorisé l'honnêteté des autres, et appréciait ceux qui habillaient leurs traits de leur âme. Ce n'était pas le cas de la jeune femme en question, ou tout du moins, à chaque instant écoulé avant qu'elle ne lui fasse part de ses réelles intentions. Et il serait malhonnête de prétendre que ces dernières ne l'avaient pas désarçonné, tant elles contrastaient violemment avec ce qu'elle avait prétendu être en premier lieu. Il l'avait d'abord soupçonnée de voir dans ce tour de jeu un passe-temps, un crève-l'ennui de môme pourrie-gâtée consistant à discréditer les employés auprès de son paternel adoré ; il l'avait imaginée aller trouver ce dernier, les yeux larmoyants, l'innocence comme étendard, raconter que le bougre en question avait eu l'insolence de l'approcher, de la toucher. Et il était certain, étant donné les talents de comédienne de la gamine : le Diable lui-même aurait pu la croire. Alors il avait attendu les foudres de Leofstan, il avait attendu le coup de fil rageur ou les hommes de main qui débarquent en pleine nuit dans son appartement – réaction logique d'un père protecteur aux affabulations d'une fille en quête d'amusement. Mais rien. Elle n'avait rien dit, pas pipé mot, alors même que la vengeance aurait été facile. Rien. Et peut-être que c'était ça, qui l'avait le plus étonné dans l'histoire.
Car il n'était plus en mesure de trouver une seule raison logique à sa conduite de l'autre soir.

À peine le temps d'avaler une tasse de café noir, qu'il constate être déjà en retard. Tant pis. Il avait joué la carte du zèle la première fois, tâché de ravaler ses instincts taciturnes pour lui être plus agréable – et voyez où la chose l'avait menée. Il n'aurait pas la patience de réitérer. Les clés sont attrapées, le blouson enfilé, et il dévale les marches de l'escalier délabré.
Le temps est étrange, dehors ; gris mais lumineux, le genre d'entre-deux tout juste printanier très spécifique à la météo anglaise. Un bourrasque de vent glacé s'engouffre dans ses cheveux, et il s'empresse de grimper dans le pickup garé juste là. Sauf qu'il constate assez vite que les rues de la ville sont gonflées de silhouettes entassées, mains serrées autour de banderoles bariolées ; un genre de manifestation visiblement, le genre auquel il n'avait jamais réussi à s'intéresser. La politique n'avait jamais eu pour lui cet attrait qu'elle peut avoir aux yeux des autres ; avant, elle l'ennuyait profondément, et il considérait avoir d'autres choses plus importantes auxquelles penser. Ses potes. Les combats. Les filles. Maintenant, c'était plutôt qu'il était à la fois trop désabusé pour croire les paroles d'hommes désignés pour représenter la masse, mais aussi pour s'intégrer à celle-ci afin de lutter contre eux. Dans un monde régi par l'argent et l'immatériel, les rassemblements comme celui qui semblait se dérouler ici n'avaient plus qu'une valeur désuète, presque nostalgique. Car les puissants avaient réussi à construire un pouvoir fictionnel et par essence inatteignable, dont les clés étaient inaccessibles pour ceux qu'ils dirigeaient. Du pur génie.
Un génie écoeurant, mais quand même.

Elle l'attend là devant l'immense demeure, silhouette solitaire et lumineuse. Lucrecia Sterling, mensonge éhonté, d'or et d'ivoire mêlés, enchantée. Elle n'a même pas fait mine de lever le nez quand le gravier a crissé sous ses pneus, sans doute était-elle trop occupée à jouer celle qu'elle n'était pas ; à broder le visage diaphane d'un angelot sur les traits du péché, à dresser le portrait lymphatique des nymphettes alanguies, juste pour l'auditoire qu'elle-seule constituait. Et à ce jeu, elle était douée. Il aurait presque pu y croire de nouveau, douter de la scénette qui s'était déroulée entre eux, si seulement elle n'avait pas levé les yeux. Ah, voilà le regard du cygne noir, l'opale trouée d'un orage diffus, appuyé sur lui avec l'aplomb glaçant des menteurs démasqués. Elle se lève, ligne gracieuse et évaporée, se dirige vers le véhicule jusqu'à y grimper.

Vous êtes en retard.
Ajoute ça à mon réquisitoire.

Même pas le temps d'une entrée en matière, de prétendre aux bonnes manières. L'accusation vole, la provocation lui répond. Les mots sont immédiatement tranchants, dépouillés de la moindre envie de faire semblant. Sur l'instant, c'est flagrant : ni l'un ni l'autre n'est ravi d'être là, d'occuper le même habitacle, le même espace resserré. C'est quelque chose qui se lit dans leurs visages, dans la tension de leurs mâchoires, la sévérité de leurs regards. Au moins sur ce point, leurs violons sont accordés. Il se demande alors pourquoi elle l'a appelé, si elle était aussi agacée que lui à l'idée de le voir ; c'est certainement la raison du coup d'oeil qu'il lui jette, mélange saumâtre de reproches et d'interrogations.

— Ne me regardez pas comme ça, Qu'elle répond, comme si elle avait saisi le fond de sa question silencieuse. Les autres chauffeurs étaient occupés et j’ai vraiment besoin de nouveaux chaussons. Je n’ai pas eu le choix.

Lentement, son regard se détourne de sa silhouette fine, alors qu'il allume le contact de la voiture pour la démarrer.

J'ai rien dit, Lâche t-il platement, le ton vaguement agacé. Contente-toi de faire la même chose.

La sincérité est brutale, mais sans doute était-elle au moins partagée. Difficile de croire qu'ils auraient l'envie de bavarder, de remplir le vide entre eux de conversations stupides et mensongères ; surtout après ce qui s'était passé. Le seul problème étant que le vide semblait se gonfler lui même d'une tension irritante, pleine d'une rancoeur mutuelle qui n'avait été exprimée que brièvement, et qui semblait se trouver à l'étroit dans les quelques mots échangés. Il lui fallait alors s'échapper de leurs esprits pour envahir l'espace qu'ils habitaient, et la sensation était relativement agaçante.
Pour peu, il aurait presque préféré recommencer à parler.

Dans les rues, le nombre de manifestants semble avoir augmenté depuis son premier passage, silhouettes collégiales aux capuches rabattues et aux voix portantes, scandant des slogans obsessionnels. La file des voitures est ralentie, et leur allure sensiblement la même que celle des piétons qui arpentent la rue. C'est comme une bulle au creux de la mêlée, un espace privilégié d'observation pour cette masse colérique ; et un instant, Max songe que la présence de Lucrecia dans cet étrange aquarium a tout d'ironique. Surtout que le nom de Sterling revient sur quelques bannières, et certainement pas pour en faire l'éloge.
De la misère, s'était-elle déjà retrouvée aux premières loges ?

T'as vraiment choisi la bonne journée, pour acheter tes pompes, Fait-il finalement avec un brin d'agacement, les doigts tapotant avec impatience sur le cuir usé du volant. Va falloir qu'on se sorte de cette foule, si on veut avoir une chance d'arriver au magasin avant la nuit.

Plus loin, une fille grimpe sur les épaules d'une autre, et brandit dans chaque main des fumigènes rouges et lumineux, scandant un slogan exalté ; « politicards, connards !».
Un mince rictus s'invite au creux des lèvres de Max, vaguement sarcastique.

Ton paternel a l'air d'avoir un fan-club impressionnant.



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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyJeu 18 Mar - 1:51

max&lucrecia / mars 2021
i don't remember the moment i tried to forget, i lost myself, is it better not said ? now i'm closer to the edge. it was a thousand to one and a million to two, time to go down in flames, and i'm taking you, closer to the edge. (@thirty seconds to mars)

Elle est là, métamorphosée, petite diablesse ayant repris largement le contrôle de la fleur fanée. De ses yeux ne se reflète plus qu’une froideur de marbre, la vérité de son incapacité à aimer. C’est une fleur sans parfum, la douce Lucya, ravissante de beauté et pourtant toujours empruntée, toujours ailleurs, toujours absente. Ce mystère qu’elle incarne, tous les ténèbres de son petit corps bleuté : ce n’est que le pâle reflet de son irréalité. Celle qu’on aime et qu’on attend vraiment n’existe pas, ce n’est qu’un mensonge, la photo de couverture retouchée d’un ouvrage aux pages vierges, la métaphore ratée d’un cliché de douceur et de bonnes manières simplement mimées. Elle n’est que froideur Lucya, et à l’intérieur de son corps quelque chose étouffe, meurt. Elle mord pour échapper à la douleur, se tord dans tous les sens jusqu’à sentir les coutures de ses contours craquer : se débarrasser de la lourde cape de tendresse qu’elle s’inflige elle-même, depuis des années.
Avec Hyacinthe, avec tous les Sterling, tout lui paraît naturel. C’est le cercle très privé dans lequel elle évolue sans jamais s’écorcher. Pas besoin de faire semblant, les caresses et les mots sont sincères parce qu’ils sont beaux. C’est la règle du sang qui règne, celle du produit reconnaissant sa race. Mais dès qu’il s’agit des autres, dès que le monde apparaît alors tout s’efface, tout s’endurcit, tout éclate. Et elle ne rêve plus que de s’abandonner, de s’écorcher.

Sur son siège en cuir, elle fixe le pare-brise d’un air renfrogné. Aucune envie de parler. Elle n’a fait appel à Max que parce qu’elle n’avait pas d’autre choix. Il n’a pas l’air ravi non plus et le silence glacé s’installant entre eux finit d’enterrer tout le malaise de l’expérience passée. Tout cela, elle a volontairement fait le choix de ne pas y penser. Son débordement, son accès de folie. Cela fait bien longtemps qu’elle a cessé de se demander ce que les hommes pouvaient bien en avoir pensé. Elle croquait puis s’enfuyait, sans demander son reste. Pire encore, même lorsque les plus fous désiraient encore la revoir, elle s’effaçait. Parce qu’ils n’étaient que des objets, des instruments infimes de son plaisir qu’il fallait détruire pour s’empêcher d’y penser. Comme un enfant cache tout juste ses bêtises sous le tapis : ramasser les morceaux de verre sans se retourner. Elle évite soigneusement de croiser le regard du plus âgé. S’il y a bien une chose dont elle ne voulait pas reparler, c’était bien de l’épisode de leurs corps froidement enlacés. Il ne comprendrait pas de toute façon, comment le pourrait-il ? Elle ne saurait même pas l’expliquer. Elle ne voulait pas l’expliquer, ne voulait même pas y songer. Aussitôt fait, aussitôt enterré. Et elle se tait, comme il le réclame. Elle fixe la route. Madone glacée.

« Comme je vous l’ai dit, je n’ai pas vraiment le choix. » Qu’elle rétorque en voyant bientôt des rondes entières de manifestants encercler la voiture. Elle grimace, se sentant encore plus engoncée qu’elle avait pu l’être. Soigneusement, elle baisse les yeux, évitant de croiser le moindre regard. Pas besoin de se faire remarquer, elle avait l’habitude des vives réactions que pouvait déclencher la simple mention du nom du paternel. « Père ne peut faire l’unanimité. » Elle le défend, bec et ongle. Comme si le trône d’acier avait besoin du moindre molosse de plus, plus cabot que réel gardien. Leofstan Sterling se défendrait bien assez seul. Même une horde de manifestants ne pouvait rien faire contre son immensité. Pourtant, elle relève un peu le menton, ressent comme le besoin de protéger. De se protéger ? Elle est perdue, perdue, perdue, cette petite poupée. « Vous n’avez qu’à les klaxonner. Ils nous emmerdent. » Qu’elle lance d’un air un peu pincé qui cache en vérité une véritable angoisse. Elle ne sait si elle est vraiment capable de rester enfermée dans cet habitacle avec lui même une dizaine de minutes de plus. Que fuit-elle, au fond ? Elle n’en a pas la moindre idée. Le regard de l’autre. Ce regard qui cherche à la cerner, qui ne la comprend pas. Ce regard mauvais et doux à la fois. Celui de l’homme intrigué, du désillusionné, piqué au vif… Pourtant, il y a quelque chose de perdu dans ces yeux là. Quelque chose qui la brise à l’intérieur, lui donne envie de l'affronter, de tout lui dire jusqu’à s’épuiser. « Tenez, garez vous là, c’est très bien, c'est parfait. » L’air de rien, elle dirige, toujours, elle sait ce qu’elle veut. À peine la voiture arrêtée, elle saute hors du monde, trop contente d’échapper à l’espace confiné. Au loin on entend encore la manifestation en train de grossir : le retour s’annonce compliqué.

Elle s’approche de la petite boutique de souliers de luxe, auréolé de petites lumières clignotantes, affichant sa vitrine impeccable et ses vendeuses élégamment parées. Elle pose un pied à l’intérieur mais se tourne vers Max juste avant d’entrer, plissant les yeux. « Max, venez. J’ai besoin de vous pour choisir. » Et devant la grimace qu’il tire soudainement, elle comprend qu’elle ne pouvait pas mieux l’emmerder. « Allez, ça ira plus vite si vous venez. » Qu’elle se justifie en levant un sourcil.
Elle ne l’attend pas, entre, les bras chastement croisés dans le dos. Le masque revient, lentement, elle redevient l’angelot. « J’ai une réservation de plusieurs paires au nom de Sterling. » La vendeuse qui s’agite, des clients trop importants, une vente cruciale qui ferait presque le chiffre d’affaire du mois. Plusieurs courbettes, on leur propose même quelque chose à boire en les faisant s’installer dans un petit salon privé. Lucya, tout à fait à sa place, déjà assise, les jambes croisées. « ça ira pour moi, merci. Voyez avec monsieur. » Elle fait, trop concentrée sur les chaussons qu’on lui présente : la quintessence de pureté. Le rose nacré dans une boite remplie de tulles. Tout ce pourquoi elle travaille depuis bien des années. Une bouteille de Champagne déjà ouverte, deux vendeuses au petit soin. C’est un univers de luxe auquel elle a toujours eu le droit. Pourtant, voir le grand Max tout embarrassé a quelque chose de plaisant. Castratrice, elle l’a toujours été, cependant, elle ne s'était jamais donné autant de mal pour quelqu'un qu’elle s’entêtait à vouloir détester.
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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyJeu 18 Mar - 23:35









closer to the edge


Il y a un monde, entre le comportement qui avait été le sien lors de la fin de leur dernière rencontre, et celui dont elle fait preuve à l'instant ; car le silence coincé entre eux dans cet habitacle a tout de pesant, genre d'élastique que l'on s'amuse à étirer jusqu'à ce que la tension en devienne intenable et que le caoutchouc blanchisse. Elle ne pipe mot, comme il le lui a demandé quelques minutes plus tôt, l'air certainement bien trop ravie de le faire, ne lui jette même pas un regard. Il devrait en être ravi ; car il n'aurait pas aimé avoir à gérer d'autres avances de sa part, ou la moindre attention trop marquée. Mais le contraste entre les deux états est trop saisissant pour être ignoré, il en devient étrange, presque dérangeant. Voyez la manière dont elle ouvre la portière de la voiture à peine celle-ci arrêtée, comme s'il lui avait fallu s'extirper au plus vite de l'habitacle et s'en échapper ; avait-elle honte de ce qui s'était passé ? Ou ce comportement n'était-il que la réaction égotique d'une adolescente à un rejet qui n'avait pas été prévu, anticipé ? Peut-être avait-elle simplement arrêté de prétendre être ce qu'elle n'était pas, et l'idée d'en jouer avec lui. Qu'il ne restait que du vide, aucune amabilité, et nulle trace de convenances faussées.
En réalité, aucune réponse ne lui semblait totalement exacte. Et cette idée le froissait.
Le voilà alors qui sort à son tour du véhicule, lui emboîtant le pas vers une boutique au rez-de-chaussée d'un bâtiment richement orné, aux vitrines claires, illuminées de lumières feutrées. Et sur le pas de la porte, son pas se stoppe, le corps effectue un mouvement raide de recul, presqu'instinctif. Il les connaissait, ces magasins aux coutures léchées et au personnel apprêté ; il y était parfois rentré par curiosité, ou pour accompagner Vivian lorsqu'elle insistait, mais il s'y était toujours senti comme un oiseau dans un bain de mazout : pas très propre, et un peu collant sur les bords. Elles étaient le symbole parfait de ce monde rejeté en bloc, dont il avait cru vouloir faire partie à un moment de sa vie – chose qui s'était révélée comme la pire décision jamais prise. Et c'était certainement la raison de cette répulsion corporelle nette, de ce réflexe renfrogné. Sauf que malgré sa réticence parfaitement intelligible à rentrer – ou plutôt à cause d'elle – voilà que la jeune Sterling fait volte face pour le scruter, tyran au cheveux dorés.

Max, venez. J’ai besoin de vous pour choisir.
Je suis sûre que tu auras toute l'aide nécessaire là-dedans, Réplique t-il en désignant la boutique d'un mouvement de menton vaguement dédaigneux.

Mais Lucrecia insiste, le ton dictateur. À la bonne heure. Il savait bien que ce n'était pas son goût en matière de chaussons qui était convoqué ici, mais son simple pouvoir d'ordonner. Le fait de s'être substitué à ses volontés une fois en avait-il fait la cible de futurs caprices, et comme on fait une promesse à Dieu, avait-elle silencieusement juré de le mettre au supplice ? Il espérait que non ; car il savait mieux que personne que sa patience avait des limites très nettes, et que le monde qui s'étendait au-delà n'était pas de ceux que l'on aurait aimé explorer.
Lentement, Max exhale, alors qu'elle se détourne de lui pour rentrer dans le magasin sans demander son reste. De toute façon, elle sait qu'il la suivra. Elle sait que pour de telles choses, il n'a pas le choix. Et vous savez le pire ? Elle a certainement raison ; même si l'admettre est contraire à beaucoup de ses principes.

Bienvenue Monsieur, si vous voulez bien me suivre.

La vendeuse est du genre tirée à quatre épingles, taille mannequin, type Barbie, le plastique en moins. Pas son genre. Si tant est qu'il en ait déjà eu un, de genre.
De toute façon, il a du mal avec les sourires crispés façon papier glacé, avec les gestes rigides, les postures frigides ; il a l'impression d'être dans ces documentaires risibles sur la royauté qui passent sur la chaine deux, et cette idée le met particulièrement mal à l'aise. Elle l'irrite, même. C'est certainement la raison pour laquelle il reste debout lorsqu'on lui propose de s'asseoir, qu'il décline champagne, café – et puis quoi encore ? Sale cabot farouche, il tiendra son rôle jusqu'au bout, et qu'elle ne compte pas sur lui pour se fondre dans la masse. Pas qu'il aurait été incapable de le faire, mais il était fatigué de jouer la comédie. C'était même presque devenu une impossibilité, tant la lassitude était grande, à ce sujet. Son regard peu intéressé circule sur les modèles de chaussures exposés, alors qu'il vagabonde machinalement dans le petit boudoir dans lequel on les a menés. Il ne semble pas d'occuper de la jeune Sterling et des deux vendeuses qui s'affairent autour d'elle comme deux abeilles devant leur reine – situation relativement risible, il faut le souligner : après tout, il n'est pas là pour juger. Simplement pour la surveiller.

— ... Nous n’avons qu’à demander à Monsieur, S'élève la voix d'une des commerçantes, celle au chignon brun serré. Blanc ou noir, qu’en pensez-vous ?

Il ne s'était pas vraiment attendu à ce qu'on s'adresse à lui, c'est la raison pour laquelle il marque un temps de pause en pivotant le menton vers elles, lorsqu'il comprend être interpellé. Aux pieds de la jeune femme, deux souliers aux allures dichotomiques : à droite, le noir, et à gauche, le blanc. La métaphore est saisissante, si réelle qu'elle en devient dérangeante.
Lucrecia était-elle ce chausson blanc qu'elle montrait à tous, ou celui de velours noir ?
Pour connaître la réponse, ne vous fiez pas à son regard, car vous n'y trouverez aucune réponse.

Je suis chauffeur, pas conseiller chez Vogue, Finit-il par lâcher en détournant les yeux du spectacle en question, sans doute pour marquer son désintérêt. 

Voyons, vous devez bien avoir un avis sur ce qui convient le mieux, Insiste l'autre d'un ton guilleret.

Putain. Il ne savait pas exactement ce qu'elle imaginait de lui, mais il avait la très nette impression qu'elle ne le lâcherait pas avant qu'il n'effectue un choix – comme si celui-ci avait été décisif. Tu parles. C'était rien qu'un discours lèche-bottes coutumier, le genre qu'on vendait aux clients pour leur faire croire qu'ils étaient puissants, que le choix d'une paire de pompes était réellement important. Mais qu'importe. En parlant de pompes, il lui donnerait ce qu'elle désirait pour qu'elle les lui lâche.
Alors, c'est un nouveau regard qu'il adresse vers le coin des essayages ; sauf que cette fois, c'est celui de Lucrecia qu'il croise.


— Noir.

Pause. Le regard a à peine cillé, tant l'aplomb était appuyé ; presque comme une forme d'accusation qu'elle serait la seule à comprendre.


— Mais de toute façon, je suis sûr qu’elle prendra les deux, histoire d'en changer à n'importe quelle occasion, Ajoute t-il machinalement en détachant les yeux de la scène pour vérifier l'heure sur son portable. Puis je doute qu'elle en ait quoi que ce soit à cirer, de mon avis sur la question.



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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyDim 21 Mar - 17:23

max&lucrecia / mars 2021
i don't remember the moment i tried to forget, i lost myself, is it better not said ? now i'm closer to the edge. it was a thousand to one and a million to two, time to go down in flames, and i'm taking you, closer to the edge. (@thirty seconds to mars)

Ces grandes vitrines où rien ne dépasse. Ces talons parfaitement empilés jusqu’à former une tour entière de cuir italien, une pile immense de milliers de dollars, des livres entières débordant jusqu’au plafond. L’air bon chic bon genre des vendeuses tirées à quatre épingles, de leurs petits chignons desquels rien ne dépasse, leurs mains immenses, manucurées, serrées l’une contre l’autre, cherchant le moindre geste qui pourrait plaire. Le sol lustré empestant encore des parfums contrefaits, la pièce parfaitement épurée et débordant pourtant de richesse, élaborée pour susciter l’envie, pour acheter jusqu’à se ruiner. Lucya a grandi dans ce milieu de luxe où tout lui appartenait sans qu’elle n’ait besoin de demander. Jamais la moindre matière non travaillée n’avait frôlé sa peau, jamais elle n’avait  connu la douleur d’un simili-cuir mal travaillé. Ce sont des biens qui se transmettent, des savoir-faire auxquels elle ne fait même plus tant attention. Difficile d’entendre l’exceptionnel quand  on n’a jamais rien connu d’autre. Elle a bien hérité des quelques pulls bien laids choisis par les grand-mères, des reliques du début du siècle, qui enserrent le cou plus qu’ils ne le parent tout à fait. Mais elle a brillé, depuis l’enfance, n’a jamais rien connu d’autre que l’amabilité même de façade de ces vendeuses trop bien éduquées.

Elle rechigne au Champagne comme on rechigne au Perrier. Douce, pourtant, ayant retrouvé ses ailes d’albâtre, c’est avec des yeux presque tendres qu’elle refuse la boisson, étend gracieusement ses jambes sur le coté. Elle tente de repose son attention sur les quelques boites qui lui sont apportées, mais son regard s’échappe malencontreusement pour chercher le long corps de Max, occupé à bouder. Cette vision lui arrache un léger sourire, presque malgré elle. Il y a quelque chose d’étrangement tendre dans cette vision du grand dadais au milieu de la dentelle. Elle est rappelée à la réalité, ce pourquoi elle a tant bataillé pour sortir malgré l’orage se préparant : deux paires de petits souliers en satin, l’une blanche, l’autre noire. Cendrillon des temps modernes, voilà qu’on lui tend délicatement le chausson pour qu’elle n’ait qu’à y glisser son pied. Dans un geste d’une lenteur infinie, elle en enfile un de chaque coté, soupirant un peu. « Je n’ai pas l’habitude ces couleurs. Mais je dois dire que ça change du rose. » Quelques couleurs de scène, pas grand risque dans la pâleur des deux complémentaires. Elle ne peut s’empêcher pourtant de relever la tête lorsque l’une des vendeuses vient demander son avis au chauffeur. Lentement, Lucya détourne les yeux, faisant mine de ne pas s’y intéresser. Elle repose chastement les yeux sur les deux souliers, fait tourner un peu ses chevilles minuscules, si fines qu’elles paraissent toujours un peu prêtes à céder.

Noir, pourtant. Le mot bien qu’à moitié avoué lui arrive de plein fouet. Comme piquée au vif, elle sursaute presque en relevant la tête vers Max, un peu plus loin. Elle le fixe, énigmatique et matée : n’en revenant pas. Elle ne dit rien pourtant, demeurant muette, le fixant de loin en observant sa silhouette se détourner à nouveau, comme si de rien n’était. Elle marque un temps, croise le regard interloqué des vendeuses, la tête penchée sur le coté, comme deux cabots attendant l’ordre du maître adoré. Lucrecia se racle la gorge, finit par se redresser. « Je prends les deux. » Il a raison. Mais elle fut si braquée sur la première réplique qu’elle n’a même pas entendu la remarque narquoise. En vérité, il n’a tord sur rien, c’est bien ce qui la fait tant coincer. Le temps de secouer un peu la tête et le sourire est là de nouveau : elle reprend les rênes qu’un simple mot de lui a réussi à lui arracher. « Je vais vous prendre une paire rose poudré aussi, s’il vous plaît. » Qu’elle lance en glissant une mèche de ses cheveux derrière son oreille ; la politesse incarnée, jusqu’au comptoir où elle sorte la carte gold dont les comptes sont encore soigneusement gérés par le patriarche. La carte n’a d’elle que le nom, tout appartient à Leofstan, elle n’a jamais même songé à la possibilité qu’il puisse en être autrement. L’argent qu’elle gagne avec les ballets, elle n’en voit même pas tant la couleur parmi toutes les économies accumulées. La fortune de la petite héritière, de la cadette tant aimée.
Elle règle le montant sans même un regard à ce qu’il peut bien afficher, récupère les quelques sacs qu’on lui tend avec le même immense sourire complètement forcé. Elle le leur rend d’ailleurs, cependant, chez elle, c’est avec un tel naturel qu’on ne pourrait songer une seule seconde à qu’il puisse manquer d’authenticité. La vraie mascarade est là, sous la pudeur et la tendresse de la demoiselle auréolée.

Toujours sans un regard à Max, elle sort de la boutique, dans un léger soupir qu’elle ne peut vraiment masquer. À peine a-t-elle posé le pied dehors, pourtant, qu’elle tombe nez à nez avec une procession entière de manifestants, ayant encerclé la voiture pourtant sagement garée. « C’est elle, je vous l’avais dit ! La gamine Sterling ! » Ses yeux bleus s’écarquillent. « T’as pas honte de t’acheter tes Repetto quand y’en a qui crèvent de faim ? » « Et ça se dit socialo ? » « Connasse ! » Ça gronde, ça s’échauffe. Par réflexe, elle recule. Elle se cogne dans le corps osseux de Max, pâlit, se retourne vers lui. Les autres s’approchent, avec leurs mille visages et leurs corps échauffés par le poids de la rage, de la hargne comme étendard. « M-Max… » Murmure Lucya, sa main venant se serrer autour du poignet de son ainé. « Il faut qu’on s’en aille. » Et elle bondit, se précipitant jusqu’à la voiture, tirant l’autre avec elle, s'élançant jusqu’à la caisse pour y entrer. Une fois qu’elle a refermée la portière, tous s’agglutinent autour du pickup, tapant contre les vitres sans les briser. Elle écarquille les yeux, fixe ce spectacle digne d’un navet post apocalyptique. Son coeur tambourine dans sa poitrine. Dans l’empressement, elle a fait tomber un des sacs. Il n’y a plus que la boîte des souliers noirs qu’elle serre contre elle, en fixant les vitres engoncées de corps furieux, privée de lumière.
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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyDim 21 Mar - 21:46









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Et soudain, c'est le bordel. Les corps agglutinés les uns contre les autres comme un amas de chair enragée, capharnaüm de barbaque bruyante, élevée à la colère, à la sédition. Au sein de cette foule déchaînée, ils ne sont plus que des pions embarqués par la force d'un attroupement collégial, comme deux minuscules poissons perdus dans les remous d'un océan furieux. Il sent les doigts de la cadette s'enrouler autour de son propre poignet, comme un réflexe nerveux pour lutter contre l'emportement, la séparation. Il ne s'en défait pas pourtant – pas cette fois. Car cette fois, c'est autre chose auquel ils sont confrontés, qui n'a rien à voir avec eux ; c'est le monde extérieur qui a gagné un masque d'hostilité, les forçant presque naturellement à adopter une posture commune. D'un mouvement, les voilà qui plongent vers l'habitacle de la voiture pour échapper à l'hystérie collective, et soudainement, l'aquarium en question devient presque rassurant. Pas qu'il aie peur pour sa propre sécurité, Max – car après tout, qu'avait-il réellement à perdre ? Mais il avait été payé pour un job simple, celui de ramener la Sterling en un seul morceau, et il ne comptait pas échouer. De toute façon, les coûts auraient été bien trop élevés ; c'était la contrepartie lorsqu'on bossait pour les puissants. Réussir n'était pas une option.
Et croyez-moi : vous ne vouliez même pas envisager l'autre solution.
Les souffles sont lourds au creux de l'espace partagé, plus sonores qu'à l'accoutumée alors que les regards papillonnent autour d'eux contre les masses informes qui s'écrasent contre les fenêtres. L'évidence devient alors flagrante : ils sont pris au piège dans cette voiture, capturés par les remous de corps enragés. Et si leur sécurité était provisoirement assurée, combien de temps tiendraient-ils ? Car dans ce genre d'échauffement collectif, ce n'était toujours qu'une question de minutes avant que la violence ne s'escalade elle-même, trouvant à chaque seconde d'autres moyens de se faire plus présente. Plus virulente. Max en savait quelque chose.

Merde, Marmonne t-il pour lui-même en actionnant les clefs sur le contact.

S'il espérait que le bruit du moteur, et la menace de voir la bagnole en question démarrer soit un répulsif efficace, il n'en était rien. Car la peur avait bel et bien déserté chacune des carcasses qui les entourait, remplacée par l'ivresse d'une hostilité jamais tout à fait assouvie. Et là était le réel danger : le manque de limites de cette euphorie brutale, de laquelle ils étaient prisonniers. Autour d'eux, les insultes fusent encore, parmi les cris et les exclamations inintelligibles. Les mâchoires de Max se crispent, à mesure que sa patience s'étiole. En un mouvement un peu vain, le voilà qui klaxonne, mais le son criard se perd bien vite dans le bordel sonore. Et il comprend que la méthode doit changer, s'ils ne veulent pas rester enfermés.
Rapidement, il jette un coup d'oeil à la jeune femme, sur le siège passager, dont les bras frêles serrent la boite cartonnée dans laquelle sont rangés ses nouveaux souliers.

Laisse ça là pour l'instant, va falloir qu'on sorte, Fait-il d'un ton directif.

Et peut-être n'est-elle pas convaincue de l'issue qu'il lui propose. Peut-être que lui même n'est pas tout à fait certain de ce qu'il fait, mais il sait une chose ; une cible mouvante a toujours plus de chance de survivre qu'une cible statique. Max actionne la poignée de la portière, mais le poids d'un corps opère une résistance telle qu'il lui faut plusieurs secondes afin de l'ouvrir complètement, et de dégager un passage vers la sortie. Ils n'ont pas de temps à perdre, et c'est la raison pour laquelle il fait signe à la Sterling de l'imiter, le regard agité, vaguement nerveux.

Amène-toi, bordel ! Lance t-il à la volée, lui indiquant de le rejoindre alors qu'il maintient la portière ouverte au sein de la foule du plat de la main.

Elle finit heureusement par s’exécuter ; certainement moins par conviction que par peur de rester seule dans l'habitacle de la voiture. Toujours est-il qu'il place une main ferme autour de ses épaules frêles une fois qu'elle pose le pied à terre, afin de l'entrainer à travers la foule. C'est comme essayer de fendre un torrent à contre-courant, ou de naviguer nez au vent ; l'énergie déployée est considérable, et la progression d'une lenteur insupportable. Mais il ne dit rien et il avance, entrainant le corps trop léger de la jeune fille contre lui pour ne pas la perdre dans la mêlée. L'important se dit-il, est d'arriver à la lisière du cortège principal, là où la concentration de manifestants se ferait moins dense. Et pour le reste, il improviserait.
Pas à pas, les voilà alors qui fendent le courant de silhouettes enchâssées ; au creux de sa cage thoracique, son coeur tambourine d'adrénaline. Mais son visage, lui, reste curieusement stoïque – ou à la rigueur agacé par le bordel qui l'entoure, et la difficulté qu'ils ont à avancer. Et après une ou deux éternités, les voilà qui gagnent finalement le bord de la route, où les manifestants se font plus épars, moins concentrés. Le souffle court, il se tourne pour la première fois vers la jeune femme, dont les cheveux blonds avaient été quelque peu décoiffés par le capharnaüm ambiant. Il ne songe plus aux différents entre eux, ne songe plus à ce qu'elle est ou ce qu'elle n'est pas ; tout ce qu'il veut, c'est qu'ils rejoignent cette putain de maison sans embuches.

Ça va aller ?

La question s'est échappée de ses lèvres machinalement, sans même qu'il n'ait vraiment à y penser. Sans attendre la réponse, il balaye la rue d'un regard vif, cherchant une solution, un échappatoire à leur situation. D'un geste, le voilà qui lance à la jeune femme un sweat à capuche certainement bien trop grand pour elle, sorte de fringue informe que quelqu'un avait oublié dans sa bagnole quelques jours auparavant et qu'il avait attrapé avant qu'ils ne s'en échappent.

Enfile ça, Indique t-il fermement. Si on veut réussir à sortir de ce merdier, c'est mieux si on te reconnait pas. J'ai l'impression que ta jolie gueule ne leur revient pas.



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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyLun 22 Mar - 0:03

max&lucrecia / mars 2021
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C’est une marée d’humains qui ne semblent plus faire qu’un, s’écrasant contre les vitres, tous pressés l’un contre l’autre, au point d’en faire trembler la caisse. Le petit attroupement s’est bien vite changé en ras-de-marée immense, d’où ne déborde plus qu’un seul visage, plein de hargne et de colère, semblant prêt à mordre. Elle sursaute alors qu’une main tente d’actionner la poignee de sa propre portière, qu’elle fixe le loquet trembler en vain, s’agitant de haut en bas jusqu’à ce que l’individu se décide enfin à le lâcher. Ils sont tous là, avec leurs grosses voix exaspérées. Ils s’insurgent du culot de la cadette, maudissent ces manières de princesse. Elle ne peut complètement leur donner tord après tout. Elle a choisi la pire journée pour venir se pavaner avec des chaussures hors de prix, elle a choisi le pire moment pour cracher au visage des pauvres gens. Elle ne peut s’empêcher d’être quelque peu fascinée par ce drôle de cortège bringuebalant, où tous, petits comme grands, ne semblent plus former qu’un immense serpent sifflant, tambourinant contre les vitres, enserrant le pickup au point de le faire vaciller. Bientôt, ils seront peut-être à terre, la voiture complètement renversée. Que faire s’ils parvenaient à les prendre, après tout ? Se déchireraient-ils la carcasse de la petite blonde offerte ? Elle ne se défendrait pas, se laisserait avalée toute entière, disparaîtrait aussi vite qu’elle était apparue et serait mangée au nom de la justice populaire. L’idée lui traverse la tête l’espace d’un instant. Tireraient-ils sur ses membres jusqu’à l’écarteler ? L’étoufferaient-ils de leur grandes mains prêtes à griffer ? Que feraient-ils, en soi, s’ils attrapaient le butin tant désiré ? Elle s’invente un scénario romanesque où ils la mèneraient jusqu’au pied de leur chef, choisiraient sa mise à mort. Comme Marie-Antoinette, condamnée à l’échafaud, les jolies mèches blondes roulant sur les pavés. Etrangement, une seconde à peine, l’idée lui plaît.

Mais un nouveau coup dans la porte la fait grimacer. Elle quitte ses pensées macabres au prix d’une angoisse plus instinctive, celle de l'animal pris au piège. Son regard croise celui d’un Max qui n’a pas l’air plus serein. L’apercevoir les dents serrées suffit à l’angoisser un peu plus : si même Max ne sait, alors ils sont perdus. Heureusement, ce dernier semble reprendre les devants aussi vite qu’il s’est laissé déborder. Il n’a pas le droit à l’erreur, même elle, elle le sait. Mais elle n’a pas même le temps de répliquer qu’il s’est déjà dégagé un passage parmi les hommes, a poussé sa portière au point d’en balayer certains. Elle cligne des yeux, pétrifiée. Pendant quelques secondes à peine elle ne parvient pas à bouger, hésite, sent ses jambes trembler. Mais elle lâche finalement le paquet tant désiré, passe sur le siège conducteur à toute vitesse et s’extirpe de la voiture. Le bras de Max autour de ses épaules s’imposent comme un véritable soulagement, son corps entier se concentre sur cette sensation, ce geste brusquement paternel, cette prise de contrôle à laquelle elle se raccroche toute entière. Elle, minuscule à ses cotés, trotte tout près, cherche à tenir le rythme. Une poussée d’adrénaline l’aide à tenir la cadence des jambes sans fin d'un Max qui la ferait presque décoller du sol tant il la maintient sous son bras. Elle manque plusieurs fois de trébucher sur ses chevilles trop maigres, pas faites pour courir sans s’échauffer. « Je… » Trouve-t-elle à peine le temps de répondre à sa question, ses cheveux blonds un peu éparpillés sur son front. Elle reprend son souffle, mais se remet immédiatement à courir en le voyant décoller. Elle ne saurait le perdre de vue, cette fois, il est l’unique clé de son salut. La phrase demeure en suspend, peu importe en soi, il n’y a plus que leurs pas en rythme cherchant à rejoindre un refuge, un asile, le moindre abri. Elle a à peine le temps de ralentir qu’elle a désormais entre les mains un vieux sweat portant trop bien son nom. Elle n’a même pas le temps de grimacer, s’exécute en l’enfilant. Bientôt, la maigreur de son corps de ballerine se perd dans l’ampleur du vêtement. D’elle même, elle vient coincer les mèches dorées dans la capuche, qu’elle arrange comme elle peut. « Là. » Qu’elle lance à Max en désignant du doigt une ruelle un peu à l’écart, devant laquelle les manifestants passent sans la voir. En vérité, l’endroit n’est pas anodin. Elle a plus l’habitude qu’elle en a l’air de ce genre de recoins secrets, pas si loin des bars qu’elle fréquente lorsque la bête est de sortie, lorsque le tigre a besoin de manger. C’est elle qui le tire par le bras pour l’y embarquer, allant se cacher derrière un amas de ferraille et de déchets oubliés. Elle soupire, reprend son souffle, toussote un peu. La gamine n’a pas la même allure dans son haut esquinté. Il n’y a plus que ses yeux bleus pour tout à fait la trahir, le céleste infini qu’on lit au fond de ses pupilles. C’est le même qu’elle adresse à Max alors qu’elle commence peu à peu à récupérer de la voix. « Personne ne viendra ici. » Pas la peine de demander pourquoi, mais elle le sait. Elle souffle, vient s’appuyer contre le mur, posant une main sur son propre coeur battant à tout rompre : comme si elle découvrait qu’il existait encore. Un silence s’ensuit, muette, elle écoute simplement les pas lointains de la marche les cherchant toujours. « Tu… Tu crois qu’ils m’auraient tuée ? » Elle le tutoie. La question est plus rhétorique qu’autre chose. Elle ne les croit pas malfaisants au point d’aller si loin, bien qu’elle connaisse les débordements liés à ce genre de manifestation. Exeter souffrait et le peuple se vengeait comme il le pouvait. Elle ne pouvait même pas leur en vouloir. « Attendons que ça se calme, avec le sweat ça devrait passer pour remonter jusqu’au manoir. » Elle n’en sait rien en vérité. Son visage est noyé dans la capuche qu’elle porte toujours. Elle croise le regard de Max, pourtant, tandis qu’une mèche de cheveux s’échappe, presque ironiquement, rebelle du jour. « Les souliers noirs, vraiment ? » Ne peut-elle s’empêcher de demander avec le petit sourire moqueur qu’il lui connaît. Malgré la douceur toujours proche de la perfection de son visage découpé, sourcil levé, les bras croisés et appuyée contre le mur, elle n’a plus le même air distingué qu’à l’accoutumée. Mais apparement, c’est ce qu’il semble aimer, le vieux caïd si mal tombé.
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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyLun 22 Mar - 15:48









closer to the edge


Planqués comme des lapins pris en chasse, les voilà qui se réfugient dans l'une de ces allées sombres dont Exeter avait le secret, à peine assez larges pour laisser la lumière s'épanouir en toute liberté. Autour d'eux gronde toujours l'insurrection montante d'une foule en prise au désarroi, mais si cette dernière semble encore trop proche, l'étroitesse de la ruelle aux hauts murs de briques rougeâtres agit comme une forteresse sur leurs corps fatigués par la course. Au creux de la poitrine de Max, le palpitant galope encore avec force, martelant ses côtes de sa course effrénée. La sensation d'éreintement l'irrite ; il n'aime pas faire la constatation de ses propres limites physiques, surtout en sachant que celles-ci ne s'arrangeaient pas avec le temps. Il n'a jamais apprécié l'idée d'être contraint, assujetti à des considérations qu'il ne maitrisait pas – comme l'usure corporelle ; mais la chose qui l'agaçait plus encore, c'était d'être en incapacité de tout à fait le masquer. Il avait pourtant jadis été tout à fait apte à ignorer la douleur, ou du moins à la cacher aux yeux du monde. Ne pas se montrer affecté, surtout pas : c'était là l'une des règles les plus importantes au sein de la jungle que constituait Exeter, et l'idée de ne plus pouvoir s'y tenir le contrariait et l'effrayait tout à la fois. Comme un vieux lion usé, il se demandait parfois ce qu'il adviendrait de lui lorsque montrer les crocs ne suffirait plus à lui garantir une forme de respect, et que les jeunes lionceaux comprendraient qu'un combat en bonne et due forme le mettrait à terre.
Il se contente d'appuyer le plat de la main sur l'un des murs en brique pour s'y appuyer, la nuque se courbant afin de retrouver un souffle régulier. À un ou deux pas tout au plus, la jeune Sterling s'adosse, le minois presqu'entièrement caché par le vêtement trop ample enfilé précédemment. Et durant plusieurs instants, le silence s'étire entre eux, seulement troué par le bruits de leurs respirations respectives – et le chuintement de fond créé par la foule galopante.

Tu… Tu crois qu’ils m’auraient tuée ? Finit-elle par lâcher du bout des lèvres, d'une voix un peu basse.

S'il ne relève pas le tutoiement, celui-ci ne lui a pas échappé. Car si lui ne s'était jamais gêné pour s'adresser à elle sans formalités inutiles, l'éducation parfaite de la jeune femme lui avait enseigné l'importance du vouvoiement envers les étrangers, sorte de distance étrange indiquée par des règles surannées. Mais dans une telle situation, ce genre de convention semblait soudainement tout à fait absurde, et peut-être était-ce la raison pour laquelle elle l'avait abandonnée.
Il renifle vaguement, relève le menton et se redresse. D'un geste presqu'automatique, le voilà qui extirpe la boite cartonnée d'un paquet de cigarettes de la poche de son blouson, coinçant l'une d'entre elles contre ses lèvres serrées.

Pour quoi faire ? Répond t-il machinalement en actionnant la flamme de son briquet, qui vient lécher l'extrémité de la clope. Tu leur serais bien plus utile vivante, s'ils avaient envie de se la jouer stratèges. T'amocher un peu, peut-être, pour la forme. Pour montrer qu'ils peuvent le faire, qu'ils ont plus grand chose à perdre. Pour faire peur à ton père.

Les faits sont énoncés platement. Le cynisme en est presque glaçant. Il a trop longtemps vécu dans ce merdier pour ne pas en connaître les règles sur le bout des doigts, et que celles-ci lui paraissent si naturelles qu'il n'ait aucune difficulté à les réciter comme s'il s'était agi de la plus grande normalité.
Il lève le menton vers le haut de la ruelle, exhale la fumée de la cigarette.

Ils veulent juste un nom à gueuler, Il poursuit, l'air vaguement absent. Le tien sonne bien, t'as pas d'chance. Sterling, ça sonne aristo, ça sonne classieux, tout ce qu'ils détestent. Rien que gueuler ton nom, ça leur suffit à se donner raison, parce qu'ils aiment le son que ça produit lorsqu'ils le crachent entre deux insultes. C'est aussi con que ça. Faut juste attendre qu'ils aient plus de voix, ou qu'ils soient crevés, qu'ils aient trop faim pour continuer à s'agiter. En fin de compte, à la fin de la journée, ils seront tous les pieds sous la table devant la télé. Tu peux m'croire. Comme si tout ça avait jamais existé.

Il marque une pause, tire sur la clope en rabaissant le menton. Elle a raison, il n'avaient qu'une chose à faire : attendre que tout ce bordel se tasse, et faire profil bas en attendant. Il espérait juste qu'en la retrouvant, sa bagnole ne serait pas bonne pour la casse. Un nouvel instant de silence s'échafaude entre eux, et pour la première fois depuis qu'ils ont déboulé dans l'allée, leurs deux regards se croisent. Et il ne sait plus vraiment ce qu'il y voit, quel rôle elle joue : cygne blanc ou cygne noir ? Gris, peut-être. Une nuance en demi-teintes, encore inconnue jusqu'à présent, l'incertitude mêlée d'insolence. L'irrévérence à la rencontre de l'innocence.
Drôle de mélange.

Les souliers noirs, vraiment ?

Pour être honnête, il ne s'était pas attendu à ce qu'elle en reparle. Mais il était bien obligé de constater que lors d'instants méticuleusement choisis, la jeune femme savait se montrer directe. Certainement trop, même.
En vérité, sur le moment, la réponse à la vendeuse tenait plus de la pique que du trait d'esprit parfaitement anticipé. Et il n'avait pas prévu d'être amené à s'en expliquer. Pendant une poignée de secondes, son regard de cille pas, à l'image de celui de la Sterling. Un brin moqueuse, vaguement chapardeuse, l'insolente attend sa réponse, se saisit du moment de tranquillité pour taquiner le vieux lion fatigué. Se pense t-elle assez douée pour le dérider ?
Le bleu assombri de ses yeux se décroche de l'opale juvénile, s'attache à la forme pourtant peu passionnante de la cigarette presque consumée.

De ce que j'en ai vu, t'es loin d'être blanche comme neige, Se contente t-il de justifier en jetant le mégot contre le goudron du sol.

Et s'ils n'en avaient pas reparlé, l'un et l'autre savait pertinemment à quoi Max faisait référence. Un abcès jamais crevé, une incohérence dans la trame du quotidien qui n'avait jamais été explicitée.
Il n'aimait pas ce qu'il ne saisissait pas, quand bien même on aurait pu remplir plusieurs bibliothèques avec toutes les choses qui lui étaient inconnues, ou incompréhensibles. Car lorsqu'il mettait le doigt sur l'une d'elles, la chose se mettait à l'agacer, comme un infime bruit scandé à répétition dont on ne détermine pas la provenance et qui semble peu à peu devenir plus présent. Puis, impossible à ignorer.

Si c'était pas pour cafter auprès de ton père et t'amuser de le voir me virer, pourquoi ? Finit-il par lâcher, sans même prendre la peine de la regarder.

Le ton de sa voix semble indiquer que la question est posée juste parce qu'elle doit l'être, que sa réponse ne l'intéresse pas vraiment. Son visage raconte la même histoire, y accorde ses violons ; mais sans doute que la vérité est tout autre, et que si l'interrogation a été soulevée, c'est en réalité qu'il n'a pas pu s'en empêcher.



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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyLun 22 Mar - 23:09

max&lucrecia / mars 2021
i don't remember the moment i tried to forget, i lost myself, is it better not said ? now i'm closer to the edge. it was a thousand to one and a million to two, time to go down in flames, and i'm taking you, closer to the edge. (@thirty seconds to mars)

Il n’y a plus que leurs deux souffles esseulés dans une ruelle pour damnés. Ses cheveux blonds collent un peu à son visage émacié par la course, se prennent dans ses cils sans fin qu’elle fait un peu papillonner, tout en reprenant son souffle, la tête baissée. Ça faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas eu peur, la petite poupée d’acier, le crâne si friable mais la tête pleine de plomb, la carcasse minuscule mais les organes figés. Ça faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas senti son coeur s’animer, tambouriner dans sa poitrine jusqu’à la faire céder. Il fallait bien qu’elle ait peur pour qu’elle se sente vivre. Lucrecia était une extrémiste, dans le vrai sens du terme. Elle ne vivait que lors d’infimes secondes trop vite avalées, lorsqu’elle se mettait en danger, lorsqu’elle se sentait mourir, prête à sombrer. Il fallait sans cesse se tester, se jeter au fond de gouffre, prendre des risques pour avoir enfin l’impression d’exister. C’était la même chose lorsqu’elle sortait le soir, à la nuit tombée, qu’elle quittait sa tour d’ivoire pour ce même genre de bas quartiers où seuls subsistent les âmes les plus esseulées. Elle qui n’avait vécu que dans du coton toute sa vie, se plaisait à s’endormir sur des piques, se jetait dans des coulées de lave, se glaçait le sang à longueur de journée. Peut-être avait-elle été trop préservée. Peut-être l’avait-on trop souvent protégée du monde extérieur, l’avait-on trop accoutumée à la grâce immense du flegme aristocrate. Elle avait vécu dans une bulle, auréolée d’élégance et de charme, et si tôt avait-elle pu le faire, elle s’était roulé dans la boue jusqu’à s’enlaidir et se faner. C’était plus fort qu’elle, un besoin de se tester, se mettre en danger. Vivre, vivre plus que n’importe quel pèquenaud des bas quartiers, fréquenter la misère, s’assassiner. C’est en voyant tous ces zombies d’hommes informes s’agglutiner autour d’elle, quelques minutes plus tôt, qu’elle l’avait encore constaté. Si elle s’était jetée dans la foule, l’auraient-ils tous possédé jusqu’à finir par l’étrangler, la jeter sous les roues, l’exécuter ? Max la rassure sans le faire, met fin à sa projection insensée. Elle l’écoute en se surprenant à l’observer. Depuis qu’ils se connaissent, le chauffeur n’a jamais prononcé plus de six mots sans s’arrêter. Alors l’entendre se lancer dans une telle tirade a quelque chose d’inédit. Elle se tait, le laisse largement parler sans s’arrêter. Le pire c’est qu’il ne s’exprime pas si mal le bougre, sait même plutôt vers quoi il tend. Il n’a même pas tord cependant, mais la réalité a toujours quelque chose de décevant. Le visage presque résigné qu’il fait alors qu’il parle a quelque chose pourtant qui la retient. Il affiche la même lassitude habituelle, inflexible ; dans ses yeux passe mille nuages incapables de faire escale, filant à travers un ciel sans couleur dont on ne peut mesurer toute la profondeur. Elle le fixe un instant, muette, la gosse infernale, au fond de ses entrailles. « Tout ça pour ça hein... » Dit-elle en se figurant l’image décevante de tous ces types une fois rentrés. Elle hausse les épaules, s’enfonçant dans le sweat qu'il vient de lui lancer. Et c’est à ce moment là qu’elle se décide à le charrier. C’est plus fort qu’elle, comme une manière de reprendre le contrôle. Qui aurait cru qu’une gamine angélique ait la moindre envie de marquer son territoire ? En vérité, elle le taquine plus qu’autre chose. Elle même ne sait pas tant si elle souhaite discuter de tout cela, revenir sur la pensée immense et sans fin de ce qui peut bien clocher dans son corps pour qu’elle se mette à sauter ainsi sur tant d’autres - sans arrêt - sans frontière.

Mais il rétorque, le diable. Il ne répond pas tant à sa question et s’étonne lui-même. Il revient sur la dernière fois, le surréalisme de leur embrassades inopinées. Même elle ne les avait pas prévu à vrai dire. Elle avait bien senti le malaise d’un chauffeur mâle, les écarts possibles d’un habitacle trop fermé… Mais elle avait cédé, honteusement, même furtivement. Comme n’importe qui l’aurait fait, il a flippé. Etrangement cependant, il n’a pas cédé. Dans la poigne ferme de l’animal encore sidéré, elle avait senti la véritable force, presque déchirée, d’un Max piqué au vif. Lentement, son visage se ferme un peu. Il y a quelque chose de son air espiègle qui s’évanouit. Les plumes noires qui se décollent assez pour apercevoir les plaies qu’elles causent, juste contre sa peau. Serait-ce un voile de tristesse presque furieuse qui passe dans les yeux de Lucya, alors qu’elle les détourne ? « Si tu penses une seule seconde que ça a à voir avec toi, Max, tu fais fausse route. » Sa voix s’élève. Elle n’a plus rien de l’artifice de douceur dont elle se pare au quotidien. Mais rien non plus de l’agressivité presque rugissante de sa forme de lionne. Elle a quelque chose d’absente, comme si elle cherchait à s’échapper. Ce même rapport à l’ailleurs qu’à Max lorsqu’il regarde sur le coté. « Tout cela, ce n’est rien d’autre qu’autocentré. Ça n’a pas vocation à te faire de mal, en vérité. » Elle inspire, finit par redresser les yeux vers lui, un instant. « Je ne me suis pas excusée pour ça, d’ailleurs. Alors je suppose que c’est peut-être le moment. » Elle inspire, plonge l’atlantique composite de ses yeux bleus dans les siens, quelques secondes, soutient leurs deux pupilles entre elles, sans un mot de plus. Elle qui s’excuse tant, perpétuellement, elle qui est l’affabilité même : les véritables regrets ne semblent se dévoiler qu’en silence. Ils restent comme ça une trentaine de secondes à peine, avant qu’elle ne secoue la tête, enfonçant un peu plus la tête dans la capuche du sweat troué. « ça a l’air de se calmer, allons y. » Ordonne-t-elle sans attendre sa réponse, l'ayant déjà dépassé. Elle sort de la ruelle, se met à marcher. En fin de ligne, ils se mêlent au reste disparate de la manifestation : quelques gugusses restants occupés à discuter. Elle marche en silence juste derrière eux, remontant vers le manoir, dont ils aperçoivent déjà l’immense portail. C’est l’entrée des Enfers où luit déjà quelques reflets du Styx ; Orphée raccompagnant Eurydice jusqu’en Enfer, comme si elle craignait d’apercevoir sa réaction à ce qu’elle a pu dire si elle prenait le risque de se retourner.
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MessageSujet: Re: CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) CLOSER TO THE EDGE. (lucyax) EmptyMar 23 Mar - 9:30









closer to the edge


À quoi s'était-il attendu, en lui posant la question ? Simple : à rien. Pour la bonne raison que même à quarante ans passés, il n'était pas encore tout à fait capable d'user de la capacité très adulte de songer aux conséquences de ses actes, de ses paroles avant de laisser ceux-ci lui échapper. Max n'avait toujours été qu'un impulsif chronique, sorte de bouchon de liège jeté en plein océan, voguant au gré de ses élans et de ses propres instincts, sans jamais avoir la bonne idée de les questionner. Avec un tel trait de personnalité, autant dire qu'il fallait s'habituer à la présence persistance des regrets. Comme une horloge aux douze traits réguliers, c'était son existence entière qui semblait minutée par les impulsions qui la rythmeraient, le mouvement de l'aiguille n'étant là que pour marquer la distance qui le séparaient de la prochaine. Et peut-être avait-il essayé un jour de se comporter différemment, mais la tare lui collait à la peau si férocement qu'elle prenait sans cesse d'autres formes, d'autres visages lorsqu'il tâchait de l'ignorer. Alors d'une certaine manière, il avait fini par l'accepter, et songer d'avantage à traiter les conséquences que ces actes pouvaient créer. Sauf que cette fois, la réponse donnée par la jeune Sterling n'a rien de banal ; la voilà sibylline, vaguement énigmatique. Des mots en demi-teintes, des syllabes écorchées, lancées puis avortées, un sens qui laisse à désirer. Il n'y a rien à comprendre là-dedans, mais pourtant, une chose lui parait sincère : l'expression éteinte de son visage blanc, comme une ode aux contradictions humaines. Durant un instant, elle semble tout autant irritée qu'en proie à un désarroi morose, sorte de tristesse étrange qui ne trouvait réponse nul part, comme si elle avait depuis longtemps abandonné l'idée de réconfort à son sujet. Mais quel en était l'objet ? Il n'aurait pas été en mesure de le deviner, et certainement pas sur base des vagues explications lâchées. Au moins celles-ci avaient le crédit de lui sembler honnêtes, malgré le flou dont elles se paraient.
Il se rappelait nettement d'un court moment leur de leur première rencontre, alors qu'ils faisaient route sur les autoroutes grises menaient vers Exeter ; de cette impression flagrante qu'il avait eu de voir en elle une silhouette qui s'échappe, dont les contours s'estompent plus à mesure qu'on s'évertuait à les observer. Était-elle vraiment de ces identités fuyantes dont la connaissance paraissait plus difficile à chaque minute, de ces fantômes que l'on cherche vainement à saisir par curiosité, par volonté égoïste de comprendre, d'appréhender le monde dans sa totalité ? Il commençait à le croire. Et égoïste, il l'avait toujours un peu été.
Il observe ces paupières baissées, ce regard absent, comme substitué à lui-même. Sorte d’ascèse étrange, moment religieux de retraite furieuse ; chose plus étrange encore, s'il l'on considère qu'elle a le visage d'une sainte écorchée, d'une Marie-Madeleine auto-crucifiée.
Le blond autour de ses joues a quelque chose d'indécent.
Et elle s'excuse, silencieusement. Ça non plus, il ne s'y était pas attendu, si bien que le regard qu'elle lui adresse est plus difficile à soutenir que les autres. Peut-être parce qu'il ne sait pas ce qu'il y lit, ni même ce que le sien raconte. Une légère confusion, certainement. Et aussi une trêve dans l'hostilité dirigée vers elle, une forme d'apaisement. L'honnêteté apaise les grondements ; les excuses, elles, closent les chapitres ouverts par le ressentiment.
Finalement, le voilà qui arrache l'oeil bleu du sien, pour jeter un coup d'oeil à l'issue de la ruelle.

D'accord, Fait-il simplement.

D'accord ? Qui Diable aurait eu l'idée de répondre de cette manière à une tentative de rédemption ? Max, peut-être. Max, qui considérait qu'il ne servait à peu de choses d'épiloguer sur le sujet, et que la formulation d'une forme d'honnêteté suffisait à passer à autre chose. Du moins, pour le moment.

Ils se remettent en marche peu de temps après, l'ambiance sonore leur indiquant que le flot de manifestant s'était certainement déporté en d'autres coins de la ville – et qu'ils avaient ainsi le champ libre. Mieux valait cependant rejoindre le manoir des Sterling à pieds, et ne pas prendre le risque d'emprunter le pick-up trop voyant de Max. C'est donc d'une démarche rapide qu'ils progressent dans les rues enchainées, Lucrecia en tête, dont il n'aperçoit que la capuche grise, que personne autour ne semble remarquer. Et plus tôt qu'il ne l'aurait escompté, ce sont les grilles en fer forgé qu'il voit poindre, marquant l'entrée de la demeure qu'ils ne tardent pas à rejoindre.
Immédiatement, voilà que la jeune femme se redresse, se débarrasse du sweat prêté pour lui tendre ; la voilà redevenu Lucrecia Sterling dans toute sa splendeur, angelot blond à peine décoiffé. À voir son expression on aurait presque pu en jurer ; rien ne s'était passé. À croire que faire croire à cette dernière invective était sa spécialité.

Je te déposerai tes pompes dans l'après-midi, quand le cortège se sera entièrement dissipé, Indique t-il sur le ton de la banalité, jetant un coup d'oeil machinal à l'entrée de la bâtisse grandiloquente.

Plongeant ses longues mains dans ses poches, il a finalement adressé un regard à la cadette devant lui.

Aucune chance que je les garde. Le rose me va pas au teint.

Et peut-être n'a t-il pas poussé le vice jusqu'à orner son trait d'ironie d'un sourire ; de sa part, il n'aurait pas fallu s'y attendre. Mais si une chose était certaine, c'était que dans le bleu de ses yeux, l'orage s'était apaisé.



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