Here we go again (Enzo)

Roxanne ne se trouve pas à la Casa, ce soir. Il lui arrive de s’offrir quelques soirées de répit quelque fois dans le mois, à souffler un peu et profiter d’une nuit ailleurs qu’entre les murs bâtis par les cowboys. Non pas qu’elle souffre de trop les voir, mais parce qu’il y a un monde qui tourne aussi en dehors de la Mariposa. Ne pas avoir de soirées rend ainsi, toujours plus compliqué la tâche de voir ses amis.
Et notamment Enzo.
Ça fait une éternité qu’ils ne se sont plus vus, lui trop pris par le Sin et elle, qui se donne à fond pour ce cabaret, petit bout d’Arizona au milieu de la population anglaise. Elle a appris à en aimer chaque coutume, les histoires et le passif de ces terres arides où trône le galop des chevaux élancés dans l’air du temps et du vent. Forcément, elle s’y implique bien trop, s’oublie et peut compter sur l’italien pour lui rappeler qu’en dehors de la Casa, elle a des amis.
Avec Enzo, pourtant, c’est particulier. Ils sont amis mais ils ont été plus sans forcément y coller une étiquette. Il est ce gentleman énigmatique qu’elle adore, qui sait faire d’elle une reine dès lors qu’elle franchit les portes de son antre de velours satiné. Dieu qu’elle apprécie l’italien pour ses manières et ce, même si leur début n’a pas bien fonctionné autant que maintenant.
C’est calme. C’est limpide. Et ils se comprennent. Quand Roxanne a besoin d’Enzo, quand elle a besoin de la chaleur de ses bras dans l’instant d’une nuit qui n’appartient qu’à eux, elle peut compter sur lui, comblant ainsi ce vide qui règne dans son cœur, tenaille son estomac sans parvenir à trouver le repos salutaire. Seulement un répit de quelques heures.
Oh bien sûr, ce n’est pas tout le temps. La danseuse sait voir en lui un ami sur qui elle peut compter, laissant le vent la porter sans trop se poser de questions.
Et comme ces soirs où elle sort, ces soirs où elle n’a pas besoin d’abuser des paillettes et du fond de teint, Roxanne se prépare, veille à répondre au standing du club. La robe noire scintillante et courte, les cheveux tombant sur ses épaules en une cascade ondulée. Du haut de ses trente sept hivers, elle n’a rien à envier de cette jeunesse fougueuse qu’elle côtoie.
Elle sent belle, fuyant l’âge et le temps qui compte. Ce soir, elle a rendez vous avec un ami.
Le temps de se préparer, il est l’heure de partir, son taxi l’attendant en bas. Roxanne conduit, à même passé son permis moto pour faire plaisir à Aris, et s’octroyer des virées avec Darius, mais ne possède pas de voitures, préfère se faire trimballer d’un côté à l’autre.
Aussi, elle est détendue et sereine durant le trajet, vérifiant une dernière fois si son rouge à lèvres n’a pas dépassé, que le blush fait ressortir l’azur de ses yeux. Tout lui convient jusqu’à ce qu’elle arrive bien vite devant le Sin, à la façade flambante et scintillante, à la hauteur du génie d’Enzo et de sa ténacité à rendre des affaires florissantes.
Quand elle arrive devant l’entrée, le vigile la reconnaît bien vite, lui fait signe de rentrer et de passer devant ceux qui attendent déjà. Elle se dirige vers le balcon, prenant l’ascenseur dédié à ceux qui surplomberont le commun des mortels, là où l’attend Enzo.
La brune laisse son regard scruter l’ensemble de ceux qui sont déjà là. Et puis, repère le coin qui n’est réservé qu’au chef des lieux quand il choisit de venir observer le spectacle faisant sa richesse. Il n’est pas encore là mais ce n’est pas grave, Roxanne est toujours en avance, déambulant parmi les clients déjà en place, puis prend place sur la banquette moelleuse, observant la scène où une danse a déjà lieu. Si heureuse et apaisée, elle sourit attendant son vieil ami avec ces hauts et ces bas qu’ils ont connu.
Ce soir, elle savoure de ne pas être à la Casa et d’avoir enfin du temps pour elle.  

Si Enzo n’est pas encore là, Roxanne n’en est pas inquiète. Depuis le temps qu’ils se connaissent, elle sait combien l’emploi du temps de l’homme est chargé et qu’il lui est parfois difficile de tout concilier, surtout quand elle-même possède une vie bien remplie. Pourtant, ce soir, Roxanne est toute heureuse à l’idée de savourer sa soirée en étant hors de la Casa, loin de ces lieux bien trop familiers et d’apprécier le temps qu’elle passera avec Enzo.
Si au départ, leurs rapports ont été houleux, plus concurrents qu’amis, les années ont permis à leur relation de s’apaiser, de trouver un sens, une profondeur et nuance faisant qu’Enzo reste important à ses yeux. Elle y tient. Et reconnaît tout là la politesse de son ami lorsqu’un serveur s’approche d’elle, tenant une bouteille de champagne dans un seau de glace ainsi qu’une rose rouge.
Sa fleur préférée. Roxanne n’empêche pas le sourire de se peindre sur ses traits lumineux, la prenant entre ses doigts fins. « Vous remercierez Monsieur Bellisario. Et surtout, qu’il prenne son temps, je ne suis pas pressée. » Oh non, elle a tout le temps ce soir. Tout le temps pour cette nuit. Tout ce qu’il pourra exiger d’elle ayant décidé qu’elle lui accorderait le temps nécessaire à entretenir cette amitié vieille depuis trop longtemps maintenant.
Elle dévisage l’homme de main d’Enzo qui ouvre la bouteille et s’empresse de la verser dans une coupe qu’il lui tend. Roxanne le remercie discrètement, prend le verre et finit par reporter son regard océan vers la scène, celle qu’elle surplombe tout en hauteur, se sentant presque puissante.
Ainsi, est-ce donc ce qu’il ressent lorsqu’il s’assoit là ? S’imaginant le brun être assis, à savourer son succès, Roxanne ne peut retenir ce sourire en se rappelant qu’il n’en demeure pas moins son ami, se rappelant avec amusement les premiers échanges ayant porté un parfum de guerre et d’affront.
« Tout a bien changé. » Murmure Roxanne en dévisageant la danse, si belle et harmonieuse, si représentative du Sin aussi tandis qu’elle sirote le champagne dont elle reconnaît le goût.
Du Enzo tout craché. Parfait jusqu’au moindre détail.
Pourtant en retard, mais qui finit par vite arriver quelques minutes plus tard. Roxanne n’a même pas le temps de se lever pour le saluer, qu’il a déjà pris sa main entre les siennes, vient y déposer ce baiser dont il a fait de leurs retrouvailles, une habitude dont elle ne peut se passer désormais. Entre ses doigts, le souillon se sent devenir princesse. Et elle aime ça. Se sentir importante dans les yeux des gens. Encore plus dans ceux d’Enzo.
« Ne sois pas désolé, voyons. Tu as des obligations et je comprends, surtout quand c’est le soir. » Et puis elle le sait quand elle voit tous les efforts que mettent les frères à faire tourner le saloon. Bien sûr, elle aide et y apporte du sien. Malgré tout, Roxanne connaît les aléas de ce métier.
« Assieds-toi donc et profitons ensemble. Je te promets que les glaçons n’ont pas eu le temps de fondre. » La voix est amusée, les yeux pétillent et elle ne bouge pas d’un iota quand il prend place à côté d’elle, si proche et pourtant encore si loin de ce qu’ils ont connu.
« Alors que t’es-t-il arrivé ? Un employé qui demandait une augmentation ? » Elle dévisage alors le serveur qui remplit la coupe pour Enzo et qui le lui tend pendant que Roxanne reprend très vite. « Et puis toi, tu vas bien ? Ça fait tellement longtemps que nous n’avons pas pris le temps d’apprécier une soirée ensemble.s » Er elle compte bien rattraper ce temps perdu.

@Enzo Bellisario