you can only fool your mind › ACHILLES

tw : TCA, addictions, crise boulimique, mention d'hospitalisation

elle tremble, l’enfant soleil recroquevillée dans la salle de bains, pile entre le lavabo et la douche. le carrelage gelé de la salle de bains se réchauffe au feu de sa culpabilité. une dizaine de bouteilles blanches devant ses yeux, vides et encore ouvertes, tandis que les traces sur ses doigts saignent. c’est trop tard au final, elle le sait. elle ne veut même pas imaginer combien, pourtant les chiffres dansent sous ses yeux, involontairement. elle ne peut pas s'en empêcher, ces chiffres restent toujours gravés dans sa mémoire. un échec supplémentaire, sans savoir pourquoi, ils s’accumulent depuis ces derniers temps. mais pas depuis l’accident d’achilles.

enfant tombée du mont olympe, l'héphaistos restée belle porte le monde à bout de bras, atlas des temps modernes. son foie dévoré par l'alcool et la cocaïne ne suffit même plus à lui donner la force de continuer, de trouver la motivation en elle à toujours donner plus, à une famille qui ne le lui rendra plus jamais. fatiguée de jouer les vigies, bouée de secours pour anorexiques à la dérive, depuis tant d’années. le silence qui se fait pesant, et le feu de son ambition qui se tait peu à peu, à force de se donner à chaque personne qu’elle rencontre. la peur qui saisit ses membres, comme autant de mains glacées sorties tout droit du styx, venant lui rappeler, l’image de son frère attaché à tant de machines, en danger si imminent. l’image de ce pilier qui s’effondre, un mur qu’elle ne pensait pas porteur, et qu’elle a abattu à coups de masse, pour pouvoir obtenir plus d’espace, plus de royaume. princesse trop envieuse de tout, en train de tout perdre. les fissures s’agrandissent dans le manoir, et elle sait ce qu’elle risque. elle tente de se faire bricoleuse soudainement, elle, la hache tranchante de boadicée.

elle sanglote et son maquillage coule, peintures de guerre qui tombent en pluie sur la faïence, tâches rouge et noires qui s’étalent sur les joints en silicones en lignes colorées. les pages d’un livre, l’éducation d’une femme, l’ambition se paye par la souffrance personnelle. tant pis, elle peut bien sacrifier ses dents, ses cheveux et ses belles hanches pour plus d’assurance. perdre le contrôle dans un environnement qu’elle connaît, pour paraître parfaite sous les feux des projecteurs léonins. quelques pas précipités. quelqu’un qui trébuche. la poignée qui s’active. elle aimerait se dépêcher, cacher quelques preuves, faire disparaître les cadavres de ces bouteilles de lait ultra protéiné, mais elle n’en a même plus le courage. elle prie pour que ce soit hyacinthe dont elle pourra toujours acheter le silence. pas ses parents -elle ne supporterait pas de briser encore le coeur de sa mère- ni achilles. surtout pas achilles. zeus ne saurait montrer une telle faiblesse en exemple à ses frères, lui qui a réclamé le ciel et l’olympe sans douter de lui-même un seul instant.

cw: mention d'aide à l'alimentation, et de vomissements de la part de sa soeur.

does it matter if we’ve gone too far

feat. @cameron sterling ☾

c'est devenu une habitude, débarquer dans la chambre de l'aînée en chaussons et pyjama changé juste parce que ça paraît sain, pas qu'il dépense la moindre goutte dedans, quand personne d'autre n'est à la maison, parce qu'il a beau expliquer que c'est bon, que rien ne changera, qu'il ne faut pas penser que c'est différent maintenant, après un diagnostic, de toutes les dernières années, où on l'a laissé seul aussi longtemps qu'on l'a toujours souhaité. mais visiblement sa dernière petite virée avait réveillé quelque chose d'absolument bancal et de ne jamais aidant, mais on ne peut pas s'en plaindre, alors on rale et on laisse aller, finalement. il se bat, mais ils gagnent tous leurs combats, ça fait une semaine maintenant. ça ne sera plus très long, dès qu'il sera moins fatigué, dès qu'on lui lâchera la grappe, dès qu'il pourra enfin se casser, disparaître pendant six mois, le temps de reprendre ses habitudes comme il l'entendait. pas la possibilité quand sa famille a tout prévu parce que sa psychiatre est une idiote de télépathe qui lit dans chacune de ses pensées. c'est devenu une habitude, de pousser la porte et de maugréer pendant trois heures, le temps d'avaler la potion qui lui rendrait la santé, qui est lourde dans son ventre et pateuse dans sa bouche, qui n'a jamais l'air bien, même s'il a vérifié des dates de péremption déjà des centaines de fois, changé les goûts, demandé à changer la marque, et après on lui a rappelé qu'il n'était pas vraiment en position de débattre, et que la question pouvait encore plus vite se régler, en hospitalisation.

et des fois ça paraît bien, juste pour être le pire de tous, pour avoir un goût de la vie du petit dernier, tout détruire, tout ruiner, les mettre face à leur incompétence, mais achilles n'est ni le meilleur, ni le premier, et ce serait guérir s'il perd son défi, et c'est suffisant pour le terrifier. parce qu'il a quelque chose, parce que ça occupe la totalité de ses pensées, et qu'il ne restera plus rien si jamais ils réussissent à s'en débarrasser. juste une coquille désintéressée de son père, de la politique, du monde, des livres, des langues mortes, des dinosaures et de la grèce antique, et du japon, parce que c'est lui tout entier qu'ils tentent de faire disparaître, d'adapter comme ils le souhaitent, alors qu'il leur a tout donné sauf ça, et que ça ne leur convient pas. mais cette fois il rentre diligemment dans la chambre de cameron, parce que sinon elle le dira, parce que sinon la psychiatre le verra, parce que sinon le médecin le pèsera, et ça ne passera pas. et quand il pousse la porte enfin, certainement pas la scène habituelle, même si les pupilles fatiguées mettent du temps à encaisser.

elle est là, au milieu de tout, comme si une apocalypse venait de passer. achilles qui comprend instantanément, les yeux écarquillés, alors que les yeux de l'aînée sont tout mouillés, que son nez est rouge et qu'elle a l'air d'avoir vécu la guerre en seulement quelques minutes, et d'avoir infiniment perdu contre les ennemis qu'elle avait combattu. sait très bien la raison, s'en veut un peu qu'on ait utilisé le mini-frigo dans sa chambre - et quel signe, et qu'est-ce qu'il en avait ri, quand la question avait été soulevée. avoir quelque chose de près, ne pas trop se dépenser, puis maintenant plus rien à consommer. t'es sérieuse, t'as pris tous ceux au café, à ce moment là tu pourrais engouffrer les vanilles, en plus ça garde le même goût si tu rends. tu réfléchis jamais, t'aurais pu m'aider. pas envie de trop sourire, parce qu'elle va mal, mais ils savent très bien que d'ici les larmes séchées, jamais il ne saura la lâcher. tu connais le chemin, je dis rien si tu dis rien. pour les six prochains jours, parce que ça fait la prescription de la semaine tout ça, j'ai bu tout ça. si tu parles, tu te plantes toi-même, et tu pourras même pas me blamer. tu veux que je t'aide à nettoyer? tu peux commencer par te débarbouiller. quelques pas tout en restant assez loin, et sur la table de chevet des lingettes attrapées. hésite pas à communiquer ta réponse ou n'importe quelle idée que tu aurais.

codage par aqua, pic par hedgekey